L’intéressant est ce qu’elle a déclaré à propos de son acte : « Il s’agit d’une œuvre d’art, réfléchie depuis au moins huit ans. Ce n’est pas un acte impulsif, c’est mon regard d’artiste qui compte. L’exhibitionnisme ne parle de rien, ce n’est pas un acte de création. » Et elle a défendu sa « performance » au moyen d’une vidéo de plusieurs minutes, visible sur Internet, où sur fond d’une musique religieuse d’Ave Maria, elle dit : « Je suis toutes les femmes ». Son acte est dans son esprit une protestation féministe contre la censure machiste, la même qui en son temps a décrété obscène le tableau même de Courbet.
Je suis d’accord pour dire qu’elle s’est livrée à une manifestation, comme celles des Femen qui s’exposent seins nus pour défendre leurs idées. Mais pas du tout avec le fait que cet acte est une « œuvre d’art ». En effet, l’art exige toujours la médiation d’une activité spécifique, très souvent longuement et durement apprise, et la mise en œuvre d’un matériau qui lui est propre : il n’est pas la vie, il la représente ou l’évoque. Le fossé est grand qui sépare, par exemple, l’image d’un corps avec la vision brute et brutale de ce corps. Le geste même d’un acteur n’appartient pas à sa vie réelle : voyez là-dessus le Paradoxe du comédien de Diderot. De là viennent les impostures de beaucoup de « performances », happenings, « installations » modernes : la nécessaire « digestion » de l’art, le fossé entre l’art et la vie n’y sont pas respectés..
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