Les caractéristiques en sont le double langage, ou bien le décalage entre la parole et les actes. Du second type me semble la dernière décision de notre président, qui a annoncé qu’il se rendrait au Qatar, si la France arrive en demi-finale lors de la Coupe du monde de foot.
Par ailleurs, il ne cesse de répéter qu’il y a aujourd’hui, pour la planète, un état d’urgence climatique. Or comment concilier ce dernier avec les infrastructures construites pour cette manifestation, dont le coût énergétique et humain est gigantesque ? On a édifié des stades climatisés, dans un pays à la chaleur extrême. Et ces constructions se sont faites au prix de l’exploitation, parfois même de la mort, d’une multitude d’ouvriers sous-payés. Tout cela contrevient à la fois à toute logique en matière de climat, et aux droits de l’homme.
Je ne sais quelle a été la motivation présidentielle pour cette décision. S’est-il agi de défendre nos intérêts économiques, en donnant ainsi des gages au Qatar ? Ou bien de flatter par démagogie la partie non négligeable de la population française qui s’intéresse encore à voir s’agiter des millionnaires en short, dont l’obscène salaire devrait lui être une provocation et une offense, si elle réfléchissait un peu ? Ou bien s’agit-il des deux à la fois ?
On sait où peut mener la realpolitik : à bien des reniements et abdications. Je sais bien qu’on peut, après Max Weber, opposer éthique de conviction et éthique de responsabilité. Mais on sait depuis le cas d’Antigone par exemple que les exigences du cœur doivent parfois prévaloir sur celles de l'état. Il est des cas où le réalisme n’est plus de mise, quand il s’agit aussi de grand enjeux : celui-ci est ni plus ni moins que la subsistance de la vie humaine sur terre. Le président aurait pu faire ici le geste éminemment symbolique du boycott d’une entreprise totalement folle, d’une parfaite hérésie écologique. Il n’en a pas saisi l’occasion. C’est bien dommage.
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