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8 septembre 2024 7 08 /09 /septembre /2024 01:00

Il peut conduire à de bien fâcheuses conséquences. Le parti socialiste en France vient d’en faire l’amère expérience. Arrimé à La France Insoumise, il a décidé de suivre le dictat du patron de ce dernier, qui au nom de la majorité obtenue par la Front de gauche aux dernières élections a voulu d’emblée imposer l’intégralité du programme qui était porté. C’était cela ou rien, à prendre ou à laisser. On n’a pas réfléchi que cette majorité n’était pas absolue, mais relative, et donc que le programme aurait en tout logique dû être amendé, compte-tenu des résultats des autres partis. Normalement des compromis auraient dû être acceptés –  sans qu’évidemment il y eût compromission, mais tout cela aurait dû être soumis à ce qui est l’essentiel de la démocratie : la discussion.

 

La deuxième occasion pour la gauche a été perdue par le refus de soutenir comme candidat au poste de Premier ministre le nom d’un ancien ministre issu de ses rangs. On connaît le résultat. Pour avoir voulu tout obtenir et refusé de pactiser, la gauche aura tout perdu. Faute d’avoir le tout de rien elle n’aura rien du tout.

 

Je laisse de côté l’extrémisme volontaire qui peut être une tactique pour faire dégénérer une situation dont on pense qu’elle sera profitable à la fin, par la désorganisation qui se produira. Mais enfin que reproche-t-on en général à la discussion et aux amendements ? C’est mettre ses convictions bien haut, que de penser qu’elles sont inattaquables. Et c’est aussi bien mépriser celles des autres.

 

Un proverbe grec, issu d’Hésiode, sait que la moitié est supérieure au tout : pléon hèmisu pantos. Si on ne peut pas tout obtenir, pourquoi refuser d’en avoir une partie ? Toutes les démocraties matures sont habituées aux compromis. Pourquoi la nôtre fait-elle exception ? Est-ce l’influence de notre Révolution historique qui nous modèle encore ?

 

Je pense à la fable de La Fontaine Les Grenouilles qui demandent un Roi. Jupiter leur envoie d’abord un soliveau, mais très vite elles se lassent de lui, le trouvant décidément trop mou. Elles en demandent un autre. Pour leur répondre alors, Jupiter leur envoie une grue, qui les mange. Que ne se sont-elles pas contentées du premier !

 

La sagesse traditionnelle insiste toujours sur la mesure essentielle en toutes choses : si on n’a pas ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on a. Mais sans renoncer à sa volonté de changement la gauche ne se serait pas à mon sens déshonorée si elle avait accepté la discussion. Au moins aurait-elle pu la tenter. Et elle n’aurait pas tant déçu ses électeurs.

 

D.R.

 

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16 octobre 2023 1 16 /10 /octobre /2023 01:00

J’ai conclu mon dernier article sur la situation géopolitique actuelle, Complexité, par la phrase suivante : « Un enfant israélien et un enfant palestinien ont le même sourire. » Je me pose maintenant la question de savoir pourquoi un enfant, qui naturellement sent comme proches de lui tous les autres enfants, potentiels camarades de jeu, peut devenir plus tard un adulte xénophobe et criminel, comme il se voit dans le confit israélo-palestinien, de quelque côté qu’on le considère.

 

Il me semble que c’est l’ambiance qui environne sa croissance, et au premier chef l’éducation qu’il reçoit, qui sont responsables de cette tragique métamorphose.

 

L’éducation idéalement devrait développer l’esprit critique de l’enfant, empêcher qu’il s’identifie pleinement à ce qu’il pense et croit, et qui est toujours sujet à examen et à doute. Elle devrait développer en lui ce qu’on appelle la métacognition, c’est-à-dire une distance constante vis-à-vis de ses propres opinions, toujours révocables. Mais non, c’est le contraire qui se produit. On veut mouler l’enfant, le façonner en lui inculquant une grille indispensable de pensée. En l’occurrence, ce seront la Bible et le Talmud pour l’un, le Coran pour l’autre. Ainsi la même terre sera dite promise par Dieu au premier, propriété du premier occupant au second.

 

L’enfant spontanément ne sait pas tout cela. Ce sont les adultes qui le lui inculquent comme pensée obligée. Ils violent en quelque sorte son esprit initialement sans tache par des diktats souvent violents et vengeurs qu’eux-mêmes ont reçus et intégrés de leurs propres parents, et ce à l’infini. Rien de naturel à cela. Tout est appris. Et ensuite à l’éducation parentale s’associe le modèle idéologique transmis par la société des adultes. À l’arrivée, on voit des enfants qui les imitent, armés et prêts à combattre (les « petits lionceaux du Khalifat », pour Daech).

 

Ce n’est donc pas pour rien que le Jésus évangélique dit qu’il faut devenir un enfant pour entrer dans le Royaume. C’est-à-dire se dépouiller de toute la carapace éducationnelle, aliénante et aveuglante quand elle n’est pas soumise à la raison. Seul l’enfant, surtout quand il ne subit pas l’entrainement possiblement mortifère d’un groupe, peut réaliser pleinement le modèle humain idéal : accueillant l’autre avec tolérance et empathie. De ce point de vue, on peut dire qu’il est plus homme que l’homme. Malheureusement il ne tient pas ce qu’il promet.

#Enfant. #Education. #Dressage.
D.R.

 

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13 mai 2022 5 13 /05 /mai /2022 01:00

S

elon la Bible il fut condamné par Dieu, pour avoir tenté Ève, à « marcher sur son ventre et manger de la poussière tous les jours de sa vie » (Genèse 3/14)

 

Évidemment le lecteur se demande alors comment il était et ce qu’il faisait auparavant : volait-il dans les airs, avait-il des pattes, par exemple de longues et fines jambes qui faisaient sa fierté ? Toutes les rêveries sont possibles...

 

Mais non, aujourd’hui le mystère est levé. On vient de révéler l’existence, au musée de Berlin, d’un fossile de serpent pourvu de quatre membres inférieurs. Cette découverte est annoncée triomphalement, photo probatoire à l’appui, sur un site juif bien-pensant, qui y voit une preuve de la vérité historique, factuelle, du récit biblique : « Découverte d’un serpent à quatre pattes comme le décrit la Torah ! » (Jforum.fr, 26/11/2017).

 

La Torah évidemment ne « décrit » pas un serpent à quatre pattes. Cette assertion est le propre d’un commentateur assurément pieux, qui extrapole sur le récit et veut le conforter par une argumentation logique qui en garantirait la vérité. Et c’est précisément cette attitude qui est bien naïve. Elle oublie le sens symbolique du récit. Comme l’écrit Alain dans Les Dieux : « Ce qui importe n’est pas si c’est vrai, mais comment c’est vrai. »

 

La Bible ne s’intéresse pas du tout à la vraisemblance factuelle de ce qu’elle raconte. Elle procède exactement comme fait Ovide dans ses Métamorphoses.

 

Le poète voit par exemple les baies rouges du mûrier, et il imagine qu’elles sont le résultat d’une fiction qu’il nous raconte : autrefois elles étaient blanches, mais Pyrame se méprenant et croyant à la mort de son amante Thisbé qu’il suppose, ne voyant plus que son écharpe, avoir été dévorée par un lion, plonge son épée dans son sein, et son sang rougit les fruits qui désormais seront rouges (IV, 55-166).

 

Il en est de même du serpent biblique : ce qu’il en fut de lui avant la malédiction divine n’a aucune importance. Simplement sa reptation actuelle est le résultat d’une fiction étiologique forgée ad hoc, pour en rendre compte.

 

Chercher de la logique dans ce type de récit procède d’un littéralisme étranger à toute poésie, donc au sens profond des choses.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 14 décembre 2017

 

D.R.

> Pour lire un article scientifique sur cette question des pattes du serpent, cliquer : ici.

 

***

 

Cet article est extrait du livre suivant :

Petite philosophie de l'Insolite
Théron, Michel
17,00Livre papier
Lire un extrait

DESCRIPTION

Les textes composant cet ouvrage sont tous parus, sous leur forme initiale, dans un journal hebdomadaire. Ils concernent des sujets d'actualité étranges, bizarres, insolites, souvent amusants, mais se prêtant toujours à un commentaire philosophique. Ils peuvent servir de points de départ pour la réflexion individuelle du lecteur, mais aussi ils peuvent alimenter des débats thématiques collectifs (cours scolaires, cafés-philo, réunions de réflexion...).

 

***

 

> Pour voir tous mes livres édités chez BoD, cliquer : ici.

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).

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