J’ai vu sur Arte, dans la soirée du 16 mai dernier, l’excellente émission Les Poisons de Poutine. On y montrait que le Maître du Kemlin n’avait pas varié d’un iota depuis sa prise de pouvoir dans son dessein impérialiste et totalitaire, tandis que chaque dirigeant occidental arrivé au pouvoir voulait à tout prix à la fois tirer un trait sur le passé (le reset d’Obama par exemple !), et avoir avec lui de nouvelles relations. Mais comment espérer de nouvelles relations d’un tyran qui applique méthodiquement depuis plus de 30 ans une tactique issue du feu KGB ?
Aussi l’émission montrait bien l’aplatissement et la servilité des dirigeants occidentaux face au despote russe. On a voulu bénéficier aussi de l’argent sale distribué à profusion, issu de la corruption de dirigeants qui ont mis leur pays en coupe réglée : le régime en effet n’est pas seulement une tyrannie, mais aussi une kleptocratie. La cupidité a poussé les occidentaux à fermer les yeux, par pur intérêt, sur sa réalité.
Finalement, cette émission était moins une critique du poutinisme qu’une condamnation dans appel de la lâcheté de l’Occident. En regard, les rares Russes courageux qui ont élevé la voix forçaient l’admiration. L’émission se terminait sur une phrase de l’opposant Vladimir Kara-Mourza, condamné à 25 ans de colonie pénitentiaire, et à qui on demandait s’il n’aurait pas mieux fait de se taire : « Tout le mal du monde se fait avec le consentement de ceux qui se taisent. »
Je pense comme lui qu’il y a plus de mal dans le monde à cause de ceux qui se taisent qu’à cause des criminels eux-mêmes. Péguy le disait bien : « Complice, c’est pire qu’auteur, infiniment pire... Laisser faire est même pire que faire. Car celui qui fait, il a au moins le courage de faire. Mais celui qui laisse faire, il y a la lâcheté en plus. » Le silence des pantoufles est plus assourdissant que les bruits de bottes.
On a beaucoup glosé sur ce qu’on appelle la soumission volontaire ou « l’obéissance passive » des citoyens face au Pouvoir. Peut-être peut-on trouver quelque excuse (mais le peut-on vraiment ?) pour ceux qui obéissent et se taisent par peur. Mais aucune à ceux qui s’aveuglent et se taisent par cupidité.
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