Je viens d’entendre la péroraison du discours de Trump, après le bombardement états-unien sur l’Iran : « Et je veux simplement remercier tout le monde, et en particulier Dieu. Je veux juste dire à Dieu qu’on l’aime, et qu’on aime nos grands soldats. Protège-les. Dieu bénisse le Moyen-Orient, Dieu bénisse Israël, et Dieu bénisse l’Amérique. Merci beaucoup. Merci. » (Source : 20minutes.fr, 22/06/2025)
Que penser de ce déploiement de gratitude, qui insère sans ambages le religieux dans le monde profane ? Je sais bien que les USA ne sont pas, comme chez nous, un pays laïque qui maintient bien une séparation entre l’espace public et les croyances privées. Que le In God we trust (Nous croyons en Dieu) figure toujours sur le dollar. Que le Président entrant en fonction jure sur la Bible. Mais enfin je suis sidéré par l’utilisation que le Président fait de Dieu dans cette circonstance où on ne l’attendait pas (un bombardement).
Bien sûr, il s’agit aussi d’une instrumentalisation. Il a voulu satisfaire une fraction importante de son électorat, les chrétiens évangéliques, soutien d’Israël pour des raisons messianiques. Il reste que la collusion de Dieu et des affaires terrestres, ainsi énoncée et si on la prend au sérieux, fait courir un danger à la démocratie : aventurée sur ce terrain, elle peut dériver en quelque chose qui ressemble bien à une théocratie.
De tout temps tout au long de l’Histoire, cette collusion a eu lieu. Dans l’Antiquité déjà le vainqueur d’une compétition l’était avec l’aide de Dieu, deo juvante, selon la formule employée aux Jeux Olympiques. Et il en est de même pour les guerres. De toujours Dieu a toujours été l’étendard derrière lequel s’abrite la force brute : il lui sert de justification et il est remercié pour cette raison. Pensons au fameux Gott mit uns (Dieu avec nous) qui figurait sur les boucles de ceinturon des nazis.
Dans cette instrumentalisation de Dieu il y a le désir de ne pas s’interroger sur le bien-fondé de sa propre conduite. Or c’est précisément ce que refuse une autre conception de ce même Dieu. Dans beaucoup de passages essentiels de la Bible, par exemple, quand l’homme affirme, il interroge, et ainsi fragilise toutes les supputations humaines. Un proverbe juif dit que Dieu rit quand l’homme pense. C’est ce qui s’oppose précisément à une vision théocratique, qui voit Dieu comme source pour l’homme de justification indubitable.
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