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n le voit renaître chez certaines instances religieuses du fait de la pandémie du coronavirus.
Ainsi l’Église orthodoxe grecque a refusé de s’abstenir de donner la communion à ses fidèles malgré les mesures sanitaires prises par les autorités (Source : la-croix.com, 11/03/2020).
L’Église catholique romaine a décidé d’accorder « l’indulgence plénière » ou pardon des péchés, aux croyants frappés par la pandémie, à condition qu’ils aient participé à des célébrations retransmises à distance dans un esprit de dévotion, et pour les mourants, qu’ils aient récité « régulièrement quelques prières durant leur vie » (ladepeche.fr, 22/03/2020).
Ces réactions procèdent d’un esprit infantile dans le premier cas, pour ce qui est de l’attachement au processus magique de l’eucharistie, et infantilisant dans le second, dévoilant une pastorale qui fait marcher les fidèles par la carotte et le bâton : aux bons croyants on vient en aide, mais aux mauvais on ne pardonne pas. On pensait que ces « indulgences » étaient reléguées aux vieilles lunes, depuis que Luther les a dénoncées. Mais non, elles perdurent, et ne font pas grandir le fidèle, qu’elles maintiennent démuni, oscillant perpétuellement entre l’espoir d’un secours et la menace d’un châtiment.
Mais le comble a été la déclaration en ligne du cardinal américain Raymond Burke, selon lequel les fidèles devraient assister à la messe malgré le coronavirus. Résidant en Italie, pays qui à ce jour a connu le plus de morts du fait de l’épidémie, sa déclaration est d’autant plus inadmissible (Source : ncronline.org, 24/03/2020).
Comme je l’ai prévu dans mon article Peur (Golias Hebdo, n°616), réapparaît la barbare théologie de la rétribution, selon laquelle l’épreuve est méritée parce qu’étant un châtiment de la justice de Dieu (théodicée).
Ainsi Burke écrit : « Il ne fait aucun doute que de grands maux comme la peste sont un effet du péché originel et de nos péchés réels. Dieu, dans sa justice, doit réparer le désordre que le péché introduit dans nos vies et dans notre monde. »
Là encore on pensait que cette idée était caduque : c’est bien assez que nous soyons dans le monde punis par nos péchés (ou nos erreurs, nos faux-pas), sans que nous le soyons encore pour nos péchés. Mais non, tous les vieux réflexes dogmatiques et cléricaux refont surface. Nous sommes loin des lumières. L’obscurité de la barbarie est insondable, et son irresponsabilité, totale.
[v. Infantilisme I et II]
Article paru dans Golias Hebdo, 9 avril 2020
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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.
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