Il est très facile à trouver, selon notre président. Ainsi à un horticulteur au chômage il vient de dire lors des dernières journées du patrimoine dans les jardins de l’Élysée : « Du travail, je traverse la rue, je vous en trouve. » Il lui a conseillé de se reconvertir dans l’hôtellerie, la restauration ou le bâtiment. Et il a ajouté : « Ils veulent simplement des gens qui sont prêts à travailler. Avec les contraintes du métier. » (Source : m.leparisien.fr, 16/09/2018)
Autrement dit, si les gens restent chômeurs, c’est qu’ils ne veulent pas travailler à n’importe quel prix : c’est donc de leur faute. Le président ne s’est pas interrogé sur le déclassement manifeste que présente le fait d’accepter n’importe quel métier, par rapport à la formation qu’on a reçue et aux compétences que l’on possède. Non, le meilleur moyen de faire baisser la courbe du chômage est de faire que les chômeurs acceptent tout emploi qui leur est proposé, indépendamment de leurs souhaits et de leur valeur personnelle.
On reste sidéré devant tant de morgue et de dédain pour les gens en difficulté. Cela cadre parfaitement d’ailleurs avec ses propos antérieurs sur le « pognon de dingue » des aides sociales, ou les « Gaulois réfractaires ». Le rôle d’un président est pourtant d’unifier la nation, et non pas de la diviser par des anathèmes qui procèdent d’un évident mépris de classe.
La moindre des choses quand on travaille, me semble-t-il, est d’y trouver une gratification, souvent moins pécuniaire d’ailleurs que morale. Quelle reconnaissance rencontrera celui à qui on a imposé un travail qui ne lui convient pas ? Quel plaisir aura-t-il de le faire, et quel épanouissement ? Quelle image de soi aura-t-il ? On peut bien lui dire qu’il faut faire marcher l’économie, de toute façon. Mais peu lui importe, si pour ce qui le concerne sa propre dignité est bafouée. C’est au travail de le servir, et non à lui d’en être l’esclave. On peut dire du travail ce que l’Évangile dit du sabbat : Le travail est fait pour l’homme et non pas l’homme pour le travail.

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