Normalement c’est le lieu où se déroule le culte. Mis à part des autres, il est pour cette raison considéré comme sacré, et donc s’oppose à l’espace profane.
Nous en sommes loin maintenant. Ainsi, pour attirer des fidèles, la cathédrale médiévale de Rochester (sud-est de l’Angleterre) a trouvé une idée : transformer sa nef en mini-golf. Les gens s’y pressent maintenant, la fréquentation ayant augmenté de plus de 80% par rapport à la même période en 2018. Et Rochester n’est pas un cas isolé. La cathédrale de Norwich (est de l’Angleterre) a installé un toboggan en spirale d’une quinzaine de mètres de hauteur, tandis que celle de Lichfield (centre de l’Angleterre) a dévoilé en juillet une réplique de la surface de la lune sur son sol. (Source : AFP, 09/08/2019)
Jusqu’à présent les églises pouvaient abriter des concerts musicaux, éventuellement quelques expositions d’œuvres d’art, mais jamais encore des installations de pur divertissement. Bien sûr on sait qu’au Moyen-Âge elles accueillaient des animaux et des marchés. Mais à cette époque la foi tout de même était grande, et si baroque que fût la fréquentation, l’édifice ne perdait pas son statut de porte ouverte sur le divin. Aujourd’hui la fréquentation devient purement ludique, et répond à cet éthos de l’amusement qui caractérise notre époque, et que Baudrillard appelait la fun morality. À la différence des promoteurs de cette innovation, je doute que ces visites débouchent sur des conversions.
Maintenant on pourrait faire une autre lecture de la chose, et considérer qu’il n’y a aucune raison de sacraliser le temple, puisque Dieu ou le divin ne réside pas dans des pierres, mais au plus profond de notre cœur. Le Verbe a dressé sa tente en nous (Jean 1/14). Et comme le Royaume, Dieu est à l’intérieur de nous (Luc 17/21). Peut-être la désacralisation des espaces extérieurs mènera-t-elle à l’intériorisation de cet Essentiel dont ont bien besoin il me semble nos contemporains dévoués au seul culte du Jeu. Bien sûr le Temple perdrait alors sa fonction traditionnelle d’espace séparé et exclusivement dédié au divin.
Mais cette vision iconoclaste, libératrice et salutaire pourtant, ne sera partagée, ni par les visiteurs, ni par les clercs, obsédés par le souci de remplir l’édifice, à défaut des cœurs, ni bien sûr par les traditionalistes défenseurs potentiellement fanatiques du Temple (en latin : fanum).

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