Ce mot récent (2008) désigne en général une xénophobie fondée sur le mépris de la langue d’autrui, et en particulier une forme de discrimination basée sur certains accents régionaux. Pour cette dernière acception le cas d’école est celui de notre nouveau Premier ministre, qui a suscité tant de railleries à cause de son accent du Sud-Ouest qu’une proposition de loi pour lutter contre ce type d’exclusions a été examinée le 18 novembre dernier à l’Assemblée nationale. Pour le rapporteur, un député de l’Hérault, l’accent ne doit pas être un critère de discrimination, au même titre que la religion ou l’orientation sexuelle, l’exclusion par l’accent mettant en péril la cohésion de la société. (Source : francetvinfo.fr, 18/11/2020)
Selon un sondage IFOP paru en janvier 2020, 16% des Français disent avoir été victimes de discriminations à cause de leurs accents. Beaucoup en font des complexes, et certains en ont été très pénalisés, par exemple à l’occasion d’un entretien d’embauche. Il ne faut pas minorer ce problème : les blessures narcissiques et les dommages sociaux qui peuvent en provenir sont très grands.
Personnellement je collabore depuis une quinzaine d’années à une radio montpelliéraine, FM Plus. Une lettre d’auditeur m’est parvenue, disant que mes émissions seraient dignes de France Culture, s’il n’y avait pas mon accent du Midi ! – Les lecteurs de Golias Hebdo peuvent d’ailleurs s’en faire une idée en écoutant les podcasts proposés sur le site de cette radio.
C’est un fait qu’il y a chez nous un centralisme parisien, linguistique et administratif. Nous le devons à l’héritage jacobin de notre Révolution, mais ce centralisme a déjà été préparé par Louis XIV. Il n’est bon bec que de Paris : qui ne parle pas comme à Paris est un tantinet ridicule, et son accent obère toujours a priori la qualité de ce qu’il dit. Combien de fois peut-on surprendre un léger sourire dans le public assistant à une conférence, si l’orateur a un accent !
Pourtant, face à ceux qui « parlent pointu », comme on dit chez moi, je garderai mon accent. Mieux, je le revendiquerai, car lui seul peut permettre de bien prononcer les vers. Qu’un Parisien s’avise de dire Booz endormi de Victor Hugo :
« Vêtu d’probité candid’ et d’lin blanc... »
Que reste-t-il de l'alexandrin ? Et de la poésie ? Le respect de la langue ici est de mon côté, et je ne vois pas mieux pour faire échec à la condescendance parisienne.
Article paru dans Golias Hebdo, 17 décembre 2020
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