Pour faire réfléchir en vue de la prochaine élection présidentielle, je reproduis ci-après un article paru dans Golias Hebdo à propos de la précédente (04/03/2017) :
C’est le gouvernement de la foule (en grec : ochlos). À la différence du peuple (en grec dêmos), entité structurée autour d’un rêve commun, la foule n’obéit qu’à ses instincts immédiats, sans réfléchir. Dans sa Psychologie des Foules, Gustave Le Bon oppose les foules, faites d’individus atomisés soumis à la seule force d’un chef, aux peuples soudés, organisés par un vrai projet collectif et conscient. Dans l’Histoire, les peuples succèdent aux foules. Mais ce mouvement n’est pas irréversible, et on peut toujours, hélas !, en démocratie même, revenir à la foule initiale.
C’est ce qui se passe actuellement. Le slogan du parti d’extrême-droite chez nous est « Au nom du peuple ! ». Mais ce « peuple » n’en est pas vraiment un, car il n’est qu’un agrégat de mécontents, qui n’a de nostalgie que celle d’un chef, en l’occurrence une démagogue qui se contente de surfer sur toutes les frustrations, d’origines fort diverses. Il suffit de voir l’aveuglement qu’il manifeste face aux ennuis judiciaires de sa dirigeante : ferait-elle les pires choses, qu’on ne lui en tiendrait pas rigueur. Il y a toujours, comme dirait Trump, des « vérités alternatives » !
Montesquieu, dans De l’esprit des lois, a bien montré que la démocratie se corrompt lorsque par démagogie le peuple devient foule, ou populace. Ainsi naissent les populismes de tous bords. Le gros Léviathan dont parle Alain n’est que réflexe, et non réflexion. Le « recours au peuple » ira nécessairement vers le pire. La foule préférera toujours Barrabas à Jésus, l’assistanat à la liberté, la peine de mort à son abolition, etc.
L’axiome Vox populi vox Dei (la voix du peuple est la voix de Dieu) me semble ce qu’il y a de plus dangereux. Les deux actuels candidats de droite (extrême et traditionnelle) disent que leur sort ne doit relever que du suffrage populaire. Ils veulent court-circuiter la justice, troisième pouvoir, dont le rôle pourtant est de juger sereinement les personnes. Mais le « peuple » est-il toujours éclairé, et une élection est-elle un plébiscite ?
04/03/2017
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