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est le fait de rendre à la terre ce corps qui en provient. N’oublions pas que les mots homme et humus ont la même racine latine. Comme aussi humble, et humilité.
En hébreu aussi le nom d’Adam, notre ancêtre, signifie : « tiré du sol ». Chouraqui le traduit d’ailleurs par « Le Glébeux » ! Ramassons donc seulement une motte de terre, et nous pouvons méditer sur notre vrai destin. Mourir, c’est seulement revenir d’où nous sommes sortis, et ranimer la nature sous une autre forme. Le plus petit bourgeon printanier suffit à montrer qu’à une autre échelle que celle de notre petite existence la mort n’existe pas.
Elle prend, désassemble, et redonne en réassemblant, comme dit Schopenhauer dans sa Métaphysique de la mort. Tout n’est que grand cycle. La fleur vient du fumier, et le fumier vient de la fleur. Comme le dit Valéry dans « Le Cimetière marin » : « Le don de vivre a passé dans les fleurs. »
... Là est la sagesse. Mais beaucoup ne l’ont pas. Je pense à ce fait-divers rapporté par la presse (AFP, 04/04/2014) : un tribunal de Blois a ordonné l’exhumation et la séparation des corps d’un couple de divorcés. Il a fait droit à la requête de la nouvelle femme du défunt, qui n’a pas supporté que son mari ait été inhumé, à l’instigation de sa belle-fille, à côté de son ancienne femme. Le Tribunal en l’espèce à parlé de « droits à la sépulture », qui devaient revenir à la seconde femme, la première après le divorce étant devenue « un tiers ».
Outre le côté « clochemerlesque » de ce jugement (délai de 2 mois pour le « déménagement » du corps, sous peine d’astreinte de 50 euros par jour de retard, payables par la belle-fille), je reste rêveur devant l’acharnement de la plaignante. Jusqu’où peuvent bien aller des haines, que la mort même ne peut apaiser ! Il suffit de voir ce qui reste de nous une fois notre corps rendu à la nature. Quiconque a pratiqué ce qu’on appelle une « réduction de tombe » voit bien que nous allons à la poussière. Les plus belles et poétiques épitaphes n’y font rien : ce sont simplement quelques vers sur beaucoup d’autres. Et si haut qu’on soit monté, on finit toujours par des cendres.
Je donnerais volontiers ce conseil à la bénéficiaire du jugement : le vrai tombeau des morts c’est le cœur des vivants. La mémoire qu’on en garde est l’essentiel, et nous mourons vraiment quand plus personne ne se souvient de nous. Laissons là où il est le cadavre, ce je ne sais quoi qui n’a de nom dans aucune langue, selon le mot de Tertullien rapporté par Bossuet.
Car cette dame, même « victorieuse », est intérieurement empoisonnée par son animosité. Elle ne vit pas. Elle devrait bien prendre leçon de la parole évangélique connue : « Laissez les morts enterrer les morts. » (Matthieu 8/22 ; Luc 9/60)
Article paru dans Golias Hebdo, 8 mai 2014
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