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ai lu sur le site internet Christnews, qui cite Wikileaks comme source, qu’un archiviste du Vatican aurait affirmé : « Dieu n’existe pas, même le Pape n’y croit pas. »
Il existerait des documents transmis exclusivement de Pape en Pape depuis le milieu du 12ème siècle. Publiés partiellement via des photos prises depuis un téléphone portable, ils témoigneraient d’un doute manifeste dans la foi. Néanmoins, ils indiqueraient tout de même l’importance pour la curie de garder une unité et un pouvoir afin de servir le monde de manière positive.
Je ne sais si ce site est bien fiable. Néanmoins, ce qu’il dit ne m’étonne pas du tout. Que des pasteurs ne croient pas pour eux-mêmes à ce qu’ils enseignent à leur troupeau, et le dissimulent pour ne pas le décourager est tout à fait possible.
Souvenons-nous de ce que dit le Grand Inquisiteur dans Les Frères Karamazov de Dostoïevski : les grands dignitaires de l’Église peuvent bien être athées en leur for intérieur, mais l’essentiel est qu’ils délivrent leurs ouailles, par l’autorité du magistère, du doute auquel pourrait les mener leur liberté de penser, ainsi que du danger de l’indécision.
C’est pour cela d’ailleurs que Jésus revenu sur terre devrait être à nouveau mis à mort, car il a arraché les hommes à une soumission heureuse, pour les éveiller à l’angoisse de la liberté personnelle, et à la responsabilité pour chacun de gérer lui-même sa vie. Dostoïevski prend bien soin de noter, par la bouche d’Aliocha, que c’est l’Église romaine qui est ici en question.
Psychologiquement, cette position s’explique. Combien de fois donne-t-on à l’entourage ce que l’on n’a pas soi-même, paix, bonheur, équilibre par exemple ! Les soignants peuvent bien nous le dire. Pourquoi en serait-il autrement s’agissant des guides religieux ? Les doutes doivent se taire devant les nécessités de la pastorale. Le but qu’on recherche l’emporte sur les états d’âme personnels.
... Mais cette duplicité parfois nécessaire peut devenir cynisme. Je pense à la parole attribuée au pape Léon X, à l’adresse du cardinal Bembo, rapportée dans le Traité des trois imposteurs (§ xv) : « Combien cette fable au sujet du Christ nous a été profitable, voilà qui est assez connu depuis toujours – Quantum nobis nostrisque ea de Christo fabula profuerit, satis est omnibus saeculis notum. »
Quand elle sert l’intérêt personnel et le goût du pouvoir, la duplicité ne s’excuse pas.
Article paru dans Golias Hebdo, 24 septembre 2015
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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.