Dans mon dernier billet Économie (Golias Hebdo n° 815), j’ai indiqué qu’elle n’est pas la solution pour remédier au réchauffement climatique, pour la simple raison qu’elle en est la cause. Pourtant on m’a fait remarquer à juste titre qu’on pouvait la faire servir à un but positif : accompagner une transition écologique. Et de fait l’isolation thermique des maisons, l’amélioration des différentes techniques permettant de moins gaspiller l’énergie, permettaient la création de beaucoup d’emplois, pour le bien être de tous.
Je viens d’employer l’imparfait, car ce « sauvetage » vertueux de la croissance dans un scénario vert est loin d’être maintenant d’actualité. On a appris par exemple que l’argent du nouveau package d’aide américaine offert à l’Ukraine servirait à alimenter les commandes de matériel militaire aux industries américaines. Il semble que c’était la condition mise par Trump pour accepter la transaction : l’offre est donc moins désintéressée qu’il n’y paraît, le gouvernement reprenant d’une main ce qu’il donne de l’autre.
Ceux qui attendaient la relance de la croissance par la transition écologique ont donc de quoi déchanter : on a finalement la relance par l’armement. Et la tendance est générale. Cette hausse des dépenses militaires (une hausse de 7%, la plus forte en 15 ans) concerne évidemment l’Europe du fait de la guerre en Ukraine. Mais pas seulement. On observe la même tendance dans toutes les zones géographiques du fait des tensions au Moyen-Orient mais aussi des craintes concernant la Chine en Asie. Exit la croissance verte ! La nouvelle croissance est rouge sang.
Et non seulement elle la remplace, mais encore elle détruit radicalement l’espérance qu’elle pouvait porter. On sait assez les catastrophes écologiques que causent les guerres. Destructions sans nombre, pollution des sols et des cours d’eaux, dégâts divers sans fin prévisibles et même souvent irréversibles. Le résultat est un gigantesque bond en arrière pour notre planète et notre humanité. Désormais il n'est rien que la mort n'affecte. Après l'anthropocène, le « thanatocène »...
Européens, nous payons ici les dividendes de la paix dont nous avons profité depuis la fin de la guerre froide, nous imaginant qu’ils seraient éternels. Notre aveuglement, notre angélisme et notre naïveté nous ont fait vivre bien longtemps au pays des Bisounours. Après avoir détruit la planète par la surexploitation, voici que maintenant nous allons la perdre par la destruction.
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