J’ai vu sur Arte, le 23 avril dernier, le film La Confession, de Nicolas Boukhrief, inspiré du roman Léon Morin prêtre de Béatrix Beck (prix Goncourt 1952). L’héroïne est une jeune femme communiste athée qui par bravade entreprend une relation avec un prêtre, dont finalement elle tombe amoureuse. Mais lui la repousse catégoriquement, et cet amour qui lui est offert se heurte chez lui, même si secrètement il peut lui être sensible, à une armure sans faille, où j’ai vu pour ma part un bloc inexpugnable de doctrine.
Le principal moteur de l’histoire est évidemment le caractère sacré du prêtre, au sens propre de séparé des autres hommes, et agissant in persona Christi (dans la personne du Christ), par exemple dans la pratique de la confession, qui est un motif essentiel et une scène récurrente du film. Je me suis alors demandé d’abord si ce non possum du prêtre, ce refus de partager l’amour qui lui est porté, était bien compatible avec un minimum d’humanité. S’accordait-il ensuite avec les textes évangéliques, dont pourtant se réclame toute la construction chrétienne ? Jésus ne laisse-t-il pas venir à lui telle pécheresse dont il nous dit qu’en l’approchant elle a montré beaucoup d’amour (Luc 7/47) ?
Je sais bien qu’on peut dire qu’il y a amour et amour, en pensant par exemple aux anciens Agapètes, qui en mêlaient les genres (rien d'impur pour qui est pur). Mais réflexion faite je ne suis pas d’accord avec leur condamnation pour hérésie, pas plus qu’avec les censeurs ecclésiaux et doctrinaires qui pourraient prétendre encore trancher entre amour humain et amour divin. Qui nous dit d’ailleurs que le premier ne peut pas être une propédeutique ou une anticipation du second ? Et que penser du refus que le prêtre lui oppose d’emblée, au risque de condamner celle qui le lui offre à un reste de vie fait de frustration et de douloureux échec, comme dans le film, ou même à la mort volontaire comme dans La Faute de l’abbé Mouret, de Zola ? Suffit-il de pleurer sur l’éternel mélodrame de l’invitus invitam (ils se séparèrent malgré lui, malgré elle) ?
Mais heureusement on vient d’apprendre qu’en Espagne l’évêque émérite de Solsona, Mgr Xavier Novell, qui avait démissionné de sa charge en 2021, à l’âge de 52 ans, a obtenu une dispense du pape François pour pouvoir se marier à l’église avec la psychologue et écrivaine Silvia Caballol (Source : cath.ch, 02.04.2024) Allons ! La doctrine n’est peut-être pas inflexible !
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