Le 10 mai dernier s’est tenu en ligne un concours de beauté pour élire Miss IA, confrontant des candidates créees par Intelligence Artificielle. Deux des quatre membres du jury étaient des humains, les deux autres membres du jury étaient des IA. (Source : actu.orange.fr, 09/05/2024)
Ce concours fait polémique sur les réseaux sociaux, comme d’ailleurs tout ce qui relève de l’Intelligence Artificielle en général. On pointe le risque de confusion avec des figures réelles pour le spectateur non averti, la mise en avant de stéréotypes de beauté poussés à l’extrême, le physique irréaliste de ces créatures fictives…
Pourtant telle n’est pas mon opinion. Si un logiciel est capable de faire la synthèse de la Beauté à partir des innombrables données qu’il a enregistrées (photographies, tableaux, etc.), pourquoi pas ? De toute façon la Beauté est un idéal lointain vers quoi tous nous tendons, et aucun visage et corps réels n’y peut correspondre complètement.
J’ai toujours regardé avec beaucoup de circonspection les concours de beauté réels, voyant dans le défilé des candidates quelque chose d’analogue aux concours de bétail dans le monde agricole. Et si « parfaite » que soit l’élue finalement, elle ne peut qu’approcher un modèle archétypal dont nous avons et aurons toujours la nostalgie. Les sculpteurs, les peintres, les plasticiens ne peuvent que l’approcher eux aussi. Rien de plus.
La Beauté est hors-vie, et la contemplation de ses approches nous fait honte de notre existence. Sa vision, comme celle de Dieu pour les croyants, fait mourir, par la sidération qu’elle provoque. La Miss humaine, la Reine d’un jour vieillira, ses traits se faneront, les rides se creuseront, tandis que la vraie Beauté est éternelle. Immobile aussi, haïssant comme dit Baudelaire « le mouvement qui déplace les lignes ». « Rêve de pierre », que gagnerait-elle à s’incarner ? Faut-il toujours lui donner vie, comme Pygmalion l’a tenté avec Galatée ?
Je sais bien que ma réflexion sur la Miss digitale peut paraître disproportionnée par le genre de considérations qu’elle invoque. On dira que l’enjeu ici n’est pas si grand, qu’il vaut mieux se satisfaire de ce qui est agréable au regard. Ou, pourquoi pas, que la Beauté est éminemment relative, que tout crapaud aime sa crapaude. Soit ! Mettons alors que je préfère être abusé que désabusé...
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