Le mot signifie l’emploi, pour arriver à ses fins, de procédés dont la moralité n’est pas garantie. On résume ordinairement cette attitude par la formule connue : « La fin justifie les moyens ». L’essentiel est d’atteindre le but qu’on se propose, et l’on n’est pas regardant sur ce qui le permet. Le résultat prime tout.
Dans le contexte de troubles sociaux actuel, il peut se faire que notre gouvernement ait adopté cette attitude face aux casseurs qui ont fait dégénérer les manifestations syndicales. Peut-être a-t-il favorisé cette dégradation, précisément pour rendre impopulaires lesdites manifestations. Ainsi a-t-on lu sur Internet une interview du secrétaire général du syndicat policier majoritaire Alliance, Jean-Claude Delage, qui s’est interrogé sur les consignes de non-intervention reçues face aux casseurs, et a accusé le gouvernement de vouloir ainsi décrédibiliser les mouvements sociaux (Source : BFMTV, 5 mai 2016).
D’après lui, la consigne du Ministère de l’Intérieur a été d’attendre au moins une heure pour réagir aux premiers troubles, alors qu’il eût été possible de réagir immédiatement. En outre, certains casseurs ayant été déjà identifiés, on aurait pu peut-être préventivement les assigner à résidence dans le cadre de l’état d’urgence, ou sinon les interpeller aussitôt qu’ils ont été remarqués.
Sartre dans Les Mains sales approuve le machiavélisme en faisant reprendre à son personnage principal la phrase de Saint-Just : « On ne peut gouverner innocemment ». Contre le « Tous les moyens ne sont pas bons » de son jeune adversaire idéaliste, il affirme : « Tous les moyens sont bons quand ils sont efficaces ». Mais c’est le même Sartre qui dissimulait les crimes staliniens, déjà connus, au nom du principe pragmatiste selon lequel : « Il ne faut pas désespérer Billancourt ».
Je pense que le réalisme n’est pas tout. Contre Sartre, Camus a fort justement défendu l’éthique dans la conduite de l’action. Il y a en effet certaines causes, si fondées soient-elles – et en l’espèce ce n’est pas le cas – qui sont disqualifiées simplement par la méthode qu’on emploie pour les défendre.
***
Nota : Un recueil de toutes les chroniques précédentes, que j'ai données à Golias Hebdo de fin décembre 2008 à début mars 2014, est disponible en version enrichie, avec regroupement thématique des notions, et assorti de nombreux liens internes et externes facilitant son exploitation, sous forme de livre électronique multimédia :
Cliquer sur l'image
commenter cet article …