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idée de châtiment divin s’associe très souvent encore aux catastrophes qui frappent notre monde.
En vertu de la vieille notion théologique de la rétribution, nous pouvons toujours associer malheur et culpabilité. Cela s’atteste dans le langage avec des expressions comme : « Mais qu’est-ce que j’ai donc fait au Bon Dieu pour mériter cela ? », ainsi que dans le double sens chez nous du mot « misérable » : « malheureux », et « méchant ». [v. Rétribution]
C’est à quoi j’ai pensé en lisant sur le site Internet du Figaro, en date du 5 août 2011, l’information, photo impressionnante à l’appui, selon laquelle un lac du Texas s’est entièrement coloré en rouge sous l’effet conjugué de la sécheresse et d’une bactérie. Ce phénomène a entraîné sur Internet nombre de messages alarmistes des tenants de la fin des temps, qui y ont vu un lien avec des versets de l’Apocalypse annonçant la transformation de la mer en sang (8/8 et 11/6).
On aurait pu penser aussi aux fameuses plaies au moyen desquelles un Dieu assurément peu miséricordieux frappe les Égyptiens, selon par exemple ce qu’il dit à Moïse : « Tu prendras de l’eau du fleuve, tu la répandras sur la terre, et l’eau que tu auras prise du fleuve deviendra du sang sur la terre. » (Exode 4/9)
Assurément c’est ce dernier passage qui a inspiré le premier, et il s’agit là, non de faits historiques constatés ou constatables, mais d’un travail de réécriture ou de palimpseste à fin d’édification, selon la technique bien connue en milieu juif du midrash. Nous sommes en pleine littérature, et ceux qui voient des faits réels ou leur possibilité dans des textes qui ne font que se réécrire et s’engendrer mutuellement, sont dupes d’une illusion majeure. Les textes sont comme les désirs ou les trains : chacun peut en cacher un autre.
Oublier ce dialogue constant entre eux, qu’on appelle l’intertextualité, est le danger de tout littéralisme. En l’occurrence, il alimente des peurs totalement irraisonnées, enfantines, comme celles de ceux qui voient des faits dans des contes de fées. [v. Littéralisme]
Bien entendu, ces peurs peuvent être instrumentalisées par les dirigeants, quels qu’ils soient (clergé, régimes théocratiques ou autocratiques...).
C’est le cas de toute forme d'eschatologie, dont notre exemple relève aussi. Devant tant de puérilités, on peut assurément se poser la question : quand les hommes consentiront-ils à grandir un peu ? [v. Historicité]
Article paru dans Golias Hebdo, 18 août 2011
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Cet article est extrait de mon ouvrage en deux tomes Chroniques religieuses, édité chez BoD, disponible à la fois en version papier et en version électronique (e-book). On peut les feuilleter en cliquant ci-dessous sur Lire un extrait. Et on peut les acheter sur le site de l'éditeur en cliquant sur Vers la librairie BoD :
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