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n en parle beaucoup aujourd’hui, pour le prendre en compte, ou le réhabiliter. Il y a même un ministère qui s’en occupe. Mais s’est-on demandé ce que le mot lui-même signifie ?
Il implique que la nature toute entière n’a pour fonction que de nous « environner », donc que nous en sommes le centre auquel elle doit apporter tribut. Cette idéologie vient sans doute du début de la Genèse, une des bases de notre culture : l’homme, fait à l’image de Dieu, doit dominer sur tout ce qui vit (1/26).
Mais la nature était là avant nous, et aussi elle sera là après nous – à supposer évidemment que nous ne l’ayons pas détruite avant. Qui nous a persuadé que toute cette biosphère, et même cet univers infini dans un infime recoin duquel nous sommes logés, aient été constitués pour notre commodité et pour notre service ?
Il est bien beau de « croître et multiplier, de remplir et de soumettre la terre » (Genèse 1/28). Mais peut-être bientôt il n’y aura plus rien à remplir, par excès de nombre, et à soumettre, par excès de pillage. Toutes les idées de développement, de croissance, qui sont nos maîtres mots d’aujourd’hui, viennent de ce début.
Certains défenseurs de ce qu’on appelle maintenant la biodiversité disent même que des expressions méprisantes comme « espèces nuisibles » s’agissant des animaux, ou « mauvaises herbes » s’agissant des végétaux, ne font en réalité que renvoyer à la vanité de l’homme, qui manque de regard d’ensemble et juge de tout en fonction de sa seule petite personne.
Contre cette paranoïa humaine, je défends toujours l’idée d’une metanoïa, d’un changement d’état d’esprit. Ici précisément je la trouve, non dans la Bible juive, immodérément triomphaliste à mon sens, mais dans l’Évangile chrétien, beaucoup plus modeste, et sur ce point à mon avis difficilement compatible avec le Premier Testament.
« Jésus a dit : ‘Ne vous souciez pas du matin au soir et du soir au matin de ce que vous revêtirez’. » Ce logion 36 de l’Évangile selon Thomas est développé dans la parabole connue des oiseaux du ciel, que Dieu nourrit, et des lys des champs, que Dieu habille (Matthieu 6/25-30 ; Luc 12/22-31)
Vis-à-vis de la nature, Jésus défend l’idée non d’un antagonisme, d’une instrumentalisation ou d’une exploitation, mais celle d’une soumission confiante, attentionnée et précautionneuse, tout orgueil humain mis de côté.
Prenons exemple sur le vrai paysan, qui n’est pas un exploitant agricole, ou un touriste en visite. Il se contente d’habiter non en propriétaire mais en locataire ou en usufruitier cette nature dont il vient, et qui n’est ni une esclave, ni un décor de théâtre, un simple environnement !
[v. Biodiversité]
Article paru dans Golias Hebdo, 2 avril 2009
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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.
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