C’est assurément une discipline des sciences humaines nécessaire pour apprécier la richesse d’un pays et pour le guider dans ses choix. Il ne viendrait à l’idée de personne de la voir disparaître. Cependant un problème se pose quand elle a la prétention de se constituer en divinité omnipotente, quand elle postule toutes choses lui doivent être soumises. C’est sans doute le cas sur une planète en grande partie sécularisée, où l’ancienne loi de Dieu a cédé la place à la loi du marché.
Un exemple frappant de ce pouvoir exorbitant est la décision récente de la Chine d’ouvrir ses frontières le 8 janvier dernier, après 1016 jours de fermeture au monde extérieur. Dans ce virage à 180 degrés Xi Jinping a fait le choix radical de l’économie plutôt que de la santé de son peuple. Et la « casse » apparaît d’ores et déjà dramatique. 37 millions de personnes sont infectées chaque jour, et on parle de centaines de milliers de morts. Les hôpitaux sont débordés, et la Chine refuse l’aide des pays étrangers qui lui proposent des vaccins. Le journal The Economist prévoit finalement 1,5 million de décès. Mais c’est là un prix que le pouvoir chinois estime négligeable par rapport aux bénéfices économiques du redémarrage.
On se félicite du fait que ce redémarrage de l’économie chinoise va alimenter la croissance mondiale. Et on oublie que, dans une planète dévastée, la croissance n’est pas la solution aux problèmes qui s’y posent, mais bel et bien le problème lui-même.
Que dans le choix chinois actuel les vies humaines ne soient rien en regard de la dictature de l’économie fait fi de toute morale. Un homme n’est-il qu’un rouage remplaçable dans le grand appareil industriel, qu’il a simplement la charge de faire fonctionner ? Un simple producteur-consommateur ? On sait pourtant depuis Kant qu’il ne faut jamais traiter autrui comme un moyen, mais comme une fin.
Il faut plutôt faire passer l’homme avant toute instance sacralisée susceptible de le dominer et de l’asservir. L’économie est une de ces idoles. Souvenons-nous que le message évangélique pousse en général l’homme à se libérer de tout ce qui l’aliène : « Le sabbat est fait pour l’homme et non pas l’homme pour le sabbat. » Adaptons cela à notre époque et à notre propos d’aujourd’hui : « L’économie est faite pour l’homme et non pas l’homme pour l’économie. »
commenter cet article …