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l’issue d’une messe à laquelle il a assisté avec le Premier ministre, en souvenir du Père Hamel assassiné l’an dernier par des terroristes islamistes, notre président a déclaré :
« Sans en diminuer l’horreur, le martyre du père Hamel n’aura pas eu lieu pour rien. Un an après nous en discernons le sens. Cela nous a rendus plus fidèles encore à ce que nous sommes, plus fidèles encore à ce qu’ils ont voulu abattre... » Or, un peu plus tôt, il avait dit : « La République garantit la liberté de croire comme de ne pas croire. La République n’a pas à combattre une religion. Elle œuvre chaque jour à ce que chacun puisse croire ou pas, en homme libre. » (Source : LeFigaro.fr, 26/07/2017)
Eh bien, je prétends que ces deux extraits ne vont pas du tout l’un avec l’autre, sont parfaitement contradictoires. En effet le second fait l’éloge de la laïcité, qui en effet garantit non seulement la liberté de croire, mais aussi, et on l’oublie bien souvent, celle de ne pas croire. Mais le premier le contredit, en qualifiant l’assassinat du Père Hamel de « martyre ».
Or ce mot est religieux. Il désigne, selon Le Robert, « la mort, les souffrances qu’un martyr, une martyre endure pour sa religion, pour ne pas renier sa foi ». Le Père Hamel n’a été un « martyr » que pour les catholiques, dont il faut rappeler d’ailleurs que seulement 5% d’entre eux vont régulièrement à la messe. Pour la grande majorité du peuple français, il a été simplement une victime innocente de la barbarie terroriste. C’est cette dernière qualification, tout à fait neutre, qu’on aurait attendue de la part d’un président d’une république laïque, qui ne doit prendre parti précisément pour aucun parti religieux en adoptant son vocabulaire.
Je ne sais si le président a rédigé lui-même ce discours, ou s’il l’a fait écrire par un autre. De toute façon, le rédacteur aurait dû se souvenir de la phrase de Confucius : « La première tâche du gouverneur d’un peuple est de restaurer le sens des mots. » Ou encore de celle de Camus : « Mal nommer les choses, c’est ajouter du malheur au monde. »
[v. Maladresse]
Article paru dans Golias Hebdo, 14 septembre 2017
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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.
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