C’est celui qui assiste le célébrant à la messe. Beaucoup de mes camarades l’ont été, quand j’étais enfant, et leur chasuble blanche les grandissait à mes yeux, par exemple quand, investis d’une sorte de majesté sacrée, ils faisaient la quête en prononçant un « Dieu vous le rende ! » imposant et comme tombé du ciel. À l’époque, je ne me posais pas la question de savoir pourquoi, parmi les enfants de chœur, il n’y avait pas de petites filles.
Mais maintenant je peux y répondre. Car si le pape François a décrété que désormais les femmes pourront avoir accès à l’acolytat et au lectorat, et si on a vu là une initiative novatrice, c’est bien qu’effectivement elle brise un tabou, celui de l’impureté féminine.
De tout temps en effet et dans la majorité des religions les femmes ont été stigmatisées à cause de leur sang menstruel. On en voit maintes illustrations dans maints passages de la Bible juive. Encore aujourd’hui dans telle tradition orthodoxe un religieux peut refuser de toucher la main d’une femme, ou d’être touché par elle, au cas où elle aurait ses règles. Voilà donc pourquoi, me dis-je, il n’y avait pas de petite fille parmi les acolytes de mon enfance.
Y réfléchissant, il me souvient aussi d’un vers de Vigny, dans « La Colère de Samson » : « La Femme, enfant malade et douze fois impur ! ». L’ayant appris au Lycée, je n’en comprenais pas le sens. Aucune note de mon manuel ne l’éclairait, et je le récitais machinalement. Tant l’enseignement d’alors était moutonnier, et tant l’ostracisme misogyne qu’il pouvait véhiculer nécessitait voilements et précautions !
La décision du pape, heureusement, est dans le droit fil de l’Évangile. Ainsi Jésus accepte d’être touché par une femme souffrant de pertes de sang depuis douze ans, et guérie par son contact (Marc 5/25-34). À l’évidence, le tabou du sang tombe ici. L’impureté véritable est dans la façon de voir les choses, dans l’œil qui est la lampe du corps (Matthieu 6/22 ; Luc 11/34). Elle n’est pas dans le déterminisme biologique qui sépare les êtres, le pur de l’impur, et institue le sacré. Cette vision nouvelle est fondamentalement anti-sacrale et antinaturaliste.
Bien sûr l’admission des femmes à l’acolytat et au lectorat ne signifie pas leur admission au sacerdoce. Mais enfin que gagneraient-elles à prendre un rôle de sacrificateur, qui est celui du prêtre, alors qu’elles peuvent donner la vie et sont donc mieux aptes à la préserver ?
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Ce texte est à paraître dans le journal Golias Hebdo. Il figurera dans une collection dont fait partie l'ouvrage suivant en tant que premier tome. On peut en feuilleter le début (Lire un extrait), et on peut l'acheter sur le site de l'éditeur (Vers la librairie BoD). Tous les livres de la collection sont aussi disponibles sur commande en librairie, ou sur les sites de vente en ligne.

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DESCRIPTION
Les textes composant cet ouvrage sont tous parus, sous leur forme initiale, dans un journal hebdomadaire. Souvent inspirés par l'actualité, ce qui les rend plus vivants, ils ont cependant un contenu intemporel, et se prêtent toujours à une réflexion philosophique. Ils peuvent servir de points de départ pour la réflexion individuelle du lecteur, mais aussi ils peuvent alimenter des débats thématiques collectifs (cours scolaires, cafés-philo, réunions de réflexion...).
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