Par ce mot j’entends le désir d’améliorer toutes choses. Il peut parfois être très positif, mais parfois aussi n’aboutir à aucune vraie amélioration, voire à son contraire.
C’est le cas du pronom personnel iel composé en mixant « il » et « elle » pour désigner une personne qui refuse d’être assignée à un genre précis, et que Le Robert a décidé de faire figurer dans son dictionnaire en ligne.
Je ne suis pas conservateur au point de repousser toute novation concernant la langue, et je sais bien que cette dernière évolue constamment selon l’usage des locuteurs. Je sais aussi qu’il y a des langues où existe le pronom personnel neutre. Malheureusement la question ici n’est pas que de vocabulaire, elle est aussi de syntaxe. Si iel s’imposait, comment faudrait-il accorder en genre l’adjectif attribut par exemple ? Dire iel est beau, ou iel est belle ? Aucune des deux versions n’est satisfaisante. Faudra-t-il créer des adjectifs neutres, non genrés ? Dire iel est belleau ? On n’en finirait pas...
Dans la langue anglaise, plus simple à certains égard que la nôtre, la question susdite ne se poserait pas, puisque les adjectifs sont invariables, non genrés. Mais chez nous ce n’est pas le cas. Il nous est assez facile de forger des mots, voire de leur affecter des sens nouveaux, comme j’ai fait pour le titre de cet article, mais il est extrêmement périlleux de toucher à la syntaxe, aux accords, qui sont le squelette et l’armature d’une langue, et aussi structurent la pensée de ceux qui la pratiquent.
Voilà donc une novation sur laquelle on n’a pas beaucoup réfléchi. Sans doute Le Robert a-t-il obéi à des motivations idéologiques plus que lexicales. Il s’est agi pour lui de valoriser les locuteurs qui se disent non binaires, mais les conséquences de son choix n’ont pas été mesurées. Je pourrais en dire autant, mutatis mutandis, de l’écriture inclusive, mise en avant pour satisfaire certains féminismes, et qui est proprement illisible dans le cas d’un texte long.
Ainsi le méliorisme est-il à double tranchant. Les Anciens disaient d’ailleurs que la pire corruption est celle du meilleur (corruptio optimi pessima). Il y a là une règle générale, applicable en maints domaines : ont sait assez que dans l’Histoire des utopies mélioristes ont fini en dystopies. Dans le cas présent, s’agissant de la structure de la langue, il faudrait n’y toucher, comme Montesquieu le disait des lois, que d’une main tremblante.
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