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est le contraire absolu de l’éducation. Celle-ci cherche à faire réfléchir l’enfant, en cultivant son esprit critique, tandis que celui-là cherche à le mouler comme une pâte malléable.
C’est à quoi j’ai pensé en visionnant l’émission Jesus camp, consacrée au modelage des enfants par une pasteure évangélique américaine, et diffusée en début de soirée sur Arte, le 20 septembre dernier. Cette émission m’a terrifié.
Étant donné qu’un tiers de la population mondiale est fait d’enfants de moins de 15 ans, cette dame a déclaré qu’il fallait bien modeler selon les vertus du revivalisme évangélique les enfants dont elle avait la garde, ne serait-ce que parce qu’en d’autres endroits du monde d’autres religions faisaient de même.
Il s’agit donc de former une armée de soldats du Christ, pour contrer bien sûr celle des soldats de l’islam dans sa version extrémiste. Évidemment on la surprendrait bien, dans son ardeur belliqueuse, en citant les Béatitudes : « Heureux les pacifiques ! » (Matthieu 5/9)
Tout le film nous montre des psychodrames obscènes, avec convulsions et larmes, tout cela au nom de l’Esprit. Évidemment cette gestuelle de « dévisseurs d’ampoules » propre aux pentecôtistes et charismatiques de toute espèce a beaucoup de succès, puisqu’elle joue, à grand renfort de musiques et de chants, uniquement sur l’émotion et l’empathie, sans qu’il s’y mêle une once de raison. On voit même des confessions publiques dont on se dit qu’elles sont arrachées ou extorquées à la malheureuse victime, et qui m’ont fait penser aux procès staliniens, de fâcheuse mémoire.
Cet endoctrinement des enfants assumé comme tel est une manipulation pavlovienne des cerveaux, un viol psychologique et moral. Finalement, on ne sert ni l’Esprit ni l’Enfant. On les dévoie.
Aussi renverrai-je cette pasteure à cet Évangile dont elle se réclame pourtant, mais qui la condamne irrémissiblement parce qu’elle se situe exactement au rebours de ce qu’il affirme.
Ainsi, pour l’Esprit dévoyé : « Tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes, mais le blasphème contre l’Esprit ne sera point pardonné. » (Matthieu 12/31)
Et pour l’Enfant intellectuellement violé : « Si quelqu’un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu’on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu’on le jetât au fond de la mer. » (Matthieu 18/6)
Finalement, le recours à l’Esprit, et l’abri qu’on y trouve, peuvent par manipulation justifier les pires crimes.
Article paru dans Golias Hebdo, 29 septembre 2011
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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.
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