Normalement affectée au monde religieux, elle signifie un souvenir laissé par un événement important dans l’ordre de la foi, et propre à nous le rappeler. On sait qu’il y a eu en monde chrétien un trafic des reliques, contre lequel Calvin s’est élevé, et qui a pu justifier l’incrimination de simonie à l’égard de l’Église catholique.
Mais nous en sommes loin aujourd’hui, en une époque où le sacré se banalise, et où l’on n’a plus que les reliques que l’on mérite. Je pense à la vente aux enchères du scooter sur lequel François Hollande allait retrouver Julie Gayet en secret, escapades qui ont fait parler en leur temps de Gayet gate. Il a été acheté pour 25 000 euros par le patron d’un musée de l’automobile à Jallais (Maine-et-Loire). Nouveau simoniaque, il pense que son acquisition va booster la fréquentation de son musée.
Si effectivement le public va se presser pour voir le Piaggio en question, à quelle motivation obéira-t-il ? Qu’imaginera-t-il face au support de l’auguste séant présidentiel ? Une nouvelle romance comme celle de Roméo et Juliette ? Et assortie d’un parfum de scandale ? On se perd en conjectures face à cette insupportable incertitude.
Il y a tout de même une explication. Même si l’ancien Président a dit à plusieurs reprises vouloir être « normal », pour s’opposer par exemple à son prédécesseur, sa fonction l’a fait considérer, ainsi que c’est la règle en Cinquième république, comme un monarque. Avec, pourquoi pas ? et mutatis mutandis, une dimension de sacré corrélative. Tout ce qu’il a touché peut donc avoir valeur de relique, et au sens étymologique de monument.
Maintenant, les hommes ne réfléchissent pas assez aux projections réellement asservissantes qu’ils font sur les puissants. De ces derniers on pourrait dire ce qu’autrefois La Boétie disait des tyrans : « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. » Il suffirait ici d’ouvrir les yeux, et le royal scooter retomberait au néant du véhicule ordinaire.
Mais non. N’importe quoi aujourd’hui peut être investi d’une valorisation particulière. Tout se noie dans l’équivalence, la relique religieuse d’autrefois et sa sœur profane d’aujourd’hui. Comme il se voit en art aussi, où un objet quelconque peut acquérir un prix stratosphérique, uniquement par la fiducia ou le crédit qu’on lui accorde. Singulière époque, où n’importe quoi convient : anything goes. Tout s’y résout en insignifiance.
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