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12 septembre 2024 4 12 /09 /septembre /2024 01:02

On parle beaucoup de la récente victoire de l’ordinateur développé par Google, AlphaGo, sur le champion du monde sud-coréen du jeu de go. On se demande maintenant jusqu’où ira l’intelligence artificielle, et si elle ne va pas finir par détrôner l’intelligence humaine.

 

Je ferai remarquer d’abord que ces machines et les programmes qui les animent ont été créés par l’homme, ce qui est déjà une preuve de sa propre intelligence. Ensuite, et plus profondément, il faut dire qu’il y a plusieurs formes d’intelligence. Certes, pour la puissance de calcul et le traitement des données emmagasinées dans une mémoire, aucun cerveau humain ne peut rivaliser avec un ordinateur. Les formidables groupements de données (les Big Data), lui seul peut les traiter correctement, les classer, en tirer des prévisions, etc.

 

Mais il ne le pourra que selon le protocole qu’on lui aura indiqué. Or celui-ci obéira forcément à une logique rigide basée sur les mathématiques. Leur caractéristique est que chaque mot, même s’il est défini arbitrairement au départ, n’a qu’un seul sens.

 

Or cela n’a rien à voir avec le langage proprement humain, dont la sémantique est floue et ouverte, polysémique : les mots y changent de sens à chaque instant (sens propre, sens figuré, etc.), leur valeur peut y miroiter à chaque répétition ou occurrence (antanaclase), leur couleur affective aussi suivant le contexte d’énonciation (ironie, antiphrase, etc.), et le sens même peut tenir à leur absence (réticence, litote, etc.) Pour percevoir cela, c’est un autre type d’intelligence qui est sollicité, dont aucun ordinateur, si perfectionné soit-il, n’est capable.

 

C’est pourquoi, pour un texte complexe, aucun logiciel de comptage lexicométrique ne rendra compte de son sens, pas plus qu’un programme automatisé ne pourra le traduire dans une autre langue, si puissants que soient les algorithmes utilisés.

 

On a tort, et cela se voit à l’école elle-même, de vouloir unir, sous le même vocable de QI, l’intelligence hypothético-déductive, et l’intelligence verbale et émotionnelle. Or ce sont deux phénomènes bien séparés. Laissons donc à l’ordinateur la première, et gardons précieusement la seconde, dans laquelle nous ne serons jamais détrônés.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 31 mars 2016

Intelligence
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commentaires

A
Il faut être juste: tu m'avais suggéré le terme, que j'ai seulement étendu au-delà de l'antanaclase, ce qui ne parait pas inapproprié, malheureusement.
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A
Les récents développements doivent peut-être inciter à réviser l'analyse, peu critiquable il y a huit ans.<br /> Par ailleurs, j'observe que la langue très appauvrie et peu "miroitante" qui domine aujourd'hui n'est pas très loin du code auquel parait vouée l'I. A.
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W
J'aime beaucoup le terme que tu emploies : "miroitante". C'est plus imagé, pour nous, qu'"antanaclastique". Merci.
M
Je suis d'accord avec ce que tu dis, cependant malgré tout l'ordinateur ne se contente pas de faire ce pour lequel il a été programmé. Il appauvrit terriblement la pensée humaine en effaçant les nuances de ses expressions et la place de la créativité de celui qui est soumis à un questionnement.Le système de son fonctionnement peut être un instrument de soumission terrible.Déjà lorsqu'on fait remarquer une faute dans un calcul, la personne responsable de la mal façon, au lieu de penser qu'elle a pu faire une erreur de frappe, répond à chaque fois: c'est forcément juste, puisque l'ordinateur l'indique et refuse de contrôler... Qu'en sera-t-il avec les robots qui programmés continueront impassiblement leur tâche, à moins de programmations très sophistiquées.
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W
Effectivement l'ordinateur peut être l'alibi de nos propres fautes. Quand quelque chose ne va pas, on le met systématiquement en question, alors qu'il s'agit peut-être d'une erreur (humaine) de programmation, d'une défaillance du logiciel, donc de quelque chose qui nous est imputable.
V
Meme en sciences l'ordinateur a ses limites.Prenons l'exemple des mathématiques.De part sa conception l'ordinateur ne connait que les nombres rationnels finis (des sous ensembles finis de Q).Les techniques employées sont l'objet de l'Analyse Numérique.C'est un chapitre des maths,mais n'est qu'un chapitre.Les autres chapitres utilisent grandement la notion d'infini et l'ordinateur n'est d'aucune aide dans ce genre de recherche surtout en maths pures.De plus il ne peut pas manipuler les nombres irrationnels comme pi ou l'exponentielle.De ce fait l'ordinateur est une aide précieuse dans les mathématiques appliquées où l'on se contente de résultats numériques approchées (Physique par exemple).Mais son emploi est décevant pour la recherche pure où on spécule avec la plus grande rigueur avec des etres mathématiques très abstraits comme les nombres transfinis et les espaces infinis.
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W
Merci, cher ami, de toutes ces remarques qui sonnent pour moi, qui suis un littéraire, comme de la poésie pure...

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).

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