Faut-il toujours écouter celui que nous donnent nos amis ? Ainsi l’un des miens vient de m’avertir de l’indisposition où je pourrais mettre mes lecteurs, en faisant un examen critique de la foi dans laquelle ils ont baigné depuis l’enfance.
C’était bon pour il y a quelques décennies, m’a-t-il dit, quand l’Église était forte et sûre de son pouvoir. Mais maintenant la société est de plus en plus sécularisée, les églises se vident, et la foi chez les derniers fidèles est de plus en plus chancelante : elle a besoin, non pas d’être fragilisée, mais réconfortée.
Et avec les derniers attentats, le temps n’est plus au doute, il ne faut pas souffler la petite flamme prête de s’éteindre de ceux qui croient encore chez nous, il faut étayer le dernier courage qui leur reste. Bref, on ne tire pas sur une ambulance.
Il ne faut donc pas dire que les textes sacrés sont hétéroclites, voire contradictoires, que certains sont d’une extrême violence, que s’ils paraissaient aujourd’hui ils tomberaient automatiquement sous le coup des lois pour apologie du meurtre, que l’image de Dieu qu’ils nous donnent n’est pas très flatteuse, au point d’y faire voir parfois un pervers sadique à l’image des dieux païens.
Il ne faut pas contester qu’il a livré pour notre salut son fils unique, sinon que dira-t-on pour les consoler à des parents qui viennent de perdre leur enfant ?
Il ne faut pas leur montrer qu’à s’inférioriser constamment dans le sentiment du péché ils risquent de s’emplir de rancœur et de devenir par inhibition violents à leur tour, car qui a peur fait peur.
Pas plus qu’à s’exalter follement dans l’espérance ils risquent de perdre la nécessaire attention au moment présent, et de faire bon marché de leur vie terrestre au bénéfice d’une vie future et d’un paradis rémunérateur où ils trouveront enfin le bonheur.
Surtout il convient bien de souligner l’importance décisive de cette croix salvatrice à l’image de laquelle ils doivent modeler leur vie en renonçant aux simples plaisirs qu’ils y peuvent trouver, en faisant une croix dessus.
C’est ainsi qu’ils ont été élevés, a conclu mon ami, et c’est là ce que montrent certains textes qui ont pour eux l’ancienneté, auxquels ils sont habitués et qu’il ne faut pas mettre en question, pas plus que beaucoup de dogmes qui ont été promulgués en étant inspirés par le Saint-Esprit, et pas plus encore que toute la catéchèse ecclésiale qui les a bercés. – Et au fond, qui ne préfère dormir à s’éveiller ?
Le quittant, je me suis bien promis de réfléchir à ce qu’il m’a dit.
[Article paru dans ma rubrique Des mots pour le dire,
Golias Hebdo, 25 février 2016]
***
Retrouvez tous mes articles de Golias Hebdo, publiés en plusieurs volumes, sous le titre Des mots pour le dire, chez BoD. Sur le site de cet éditeur, on peut en lire un extrait, les acheter... Cliquer : ici.
Notez qu'ils sont aussi tous commandables en librairie, et sur les sites de vente en ligne (Amazon, Fnac, etc.).
commenter cet article …