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18 février 2022 5 18 /02 /février /2022 02:00

J’ai entendu au Journal de 13 H de France Inter, le 17 février dernier, un groupe de jeunes lycéens s’exprimer sur la future élection présidentielle. J’ai été frappé de la maturité et de la pertinence qui se dégageaient de leurs propos.

 

S’agissant d’avancer le droit de vote à 16 ans, proposition de plusieurs candidats de gauche, la grande majorité des intervenants était contre, au motif que les jeunes de cet âge n’avaient ni la maturité ni l’expérience suffisantes pour se décider en cette matière. Eux-mêmes doutaient d’ailleurs qu’ils puissent être dans ce cas. Au surplus, ont-ils fait remarquer, cela entraînerait fatalement de la part des politiques une communication encore plus infantile pour s’adresser à cet âge, et le niveau général du débat n’en sortirait pas grandi. J’ai trouvé ces remarques d’une grande lucidité.

 

Concernant les propositions d’octroyer sans contrepartie une somme d’argent à tous les jeunes venant d’accéder à la majorité, ils ont très justement fait remarquer qu’il s’agissait là simplement d’« acheter les jeunes ». Ils ont bien percé à jour ce qu’il y a dans une telle mesure : on distribue un petit capital, mais ensuite on se tient quitte de toute autre chose, comme de l’aide efficace pour trouver un emploi. Ce dernier engage toute la vie future, tandis que le pécule peut être très vite évanoui. Pour certains qui en feront bon usage, d’autres la gaspilleront pour leurs loisirs : cette remarque intelligente a bien été faite par un intervenant.

 

Cela me fait penser aux caisses noires de certains employeurs, qui sont destinées à être versées aux syndicats pour, doux euphémisme, « fluidifier les relations sociales ». En fait, pour acheter la paix sociale.

 

Un proverbe dit bien : « Si on donne à quelqu’un un poisson, on le nourrit pour un jour. Si on lui apprend à pêcher, on le nourrit pour toute la vie. » On voit bien là les limites de la charité d’un jour. Elle ne doit pas dispenser de la justice de toujours.

 

Il me semble que l’octroi d’un pécule doit respecter la dignité de celui qui le reçoit. La jeunesse ne demande pas un cadeau, quel qu’en soit le montant, mais une aide efficace pour trouver un travail. De ce point de vue, il n’y a aucun inconvénient à ce que cet octroi se fasse sous condition.

 

Merci à ces jeunes gens et filles, qui ont percé à jour ici la démagogie. La jeunesse attire les démagogues comme le miel attire les mouches.

 

D.R.

 

***

 

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14 février 2022 1 14 /02 /février /2022 02:00

Invité d’un talk-show à la télévision italienne, le pape François a engagé son intervieweur à faite preuve d’humour, en ajoutant : « C’est un médicament. » Et il a fait mention de la prière de saint Thomas More, qu’il récite, a-t-il dit, depuis plus de 40 ans : « Ne permets pas que je me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j’appelle ‘moi’. Seigneur, donne-moi l’humour... » (Source : franceinter.fr, 09/02/2022)

 

En disant cela, le pape a fait preuve d’une profonde intuition théologique. L’humour est en effet une preuve de la parfaite transcendance de Dieu. Un proverbe juif dit : « Dieu rit quand l’homme pense. » C’est-à-dire qu’il déjoue toutes nos supputations à son propos. L’esprit de sérieux des hommes, au contraire, fait d’eux des psychorigides, campés sur leurs certitudes, survalorisant aussi jusqu’à la paranoïa leur petit moi, pour reprendre l’expression de Thomas More. Ils affirment constamment, alors que Dieu se plaît à les interroger seulement, pour les ébranler. C’est frappant dans la Bible. Il n’est que de voir le questionnement de Dieu face à Caïn après le meurtre d’Abel, ou bien celui qu’il adresse à Jonas, modèle du parfait psychorigide, sûr de lui et égocentré.

 

Pour reprendre l’opposition de Bergson dans Les Deux sources de la morale et de la religion, à la pensée close l’humour fait succéder la pensée ouverte. Aux certitudes péremptoires, l’ouverture salutaire du doute. Dans la vie on ne sait jamais, ou jamais on ne sait. Quand Jésus dit à ses disciples d’aimer leurs ennemis, il réserve la part fondamentale d’indécision qu’il faut attribuer à Dieu, « car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes. » (Matthieu 5/45) Tous les scénarios souvent simplificateurs et manichéens qui sont le fait des hommes tombent devant cette formule qui est bien, comme le non resistere malo qu’elle contient (ne pas résister au méchant), d’essence humoristique, car profondément paradoxale.

 

L’humour renverse les hiérarchisations habituelles. Il parle légèrement des choses sérieuses, et sérieusement des choses légères. En cela il agit comme il est dit de Dieu dans la prière du Magnificat : il renverse les puissants de leur trône et élève les humbles (Luc 1/52). Ou encore, dans le même esprit : Les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. (Matthieu 20/16).

 

Merci en tout cas au pape François ! À l’image de son chef, puisse l’Église toute entière être acquise à la cause de l’humour !

 

D.R.

 

***

 

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12 février 2022 6 12 /02 /février /2022 02:00

C’

est aux yeux de tous une grave pathologie, s’opposant à l’état de normalité. Chacun pense qu’il en est préservé.

 

Mais cette rassurante opposition m’a quitté, quand j’ai lu un intéressant article émanant de médecins américains selon lequel les grandes figures du monothéisme ont souffert de pathologies mentales (Source : Slate.fr, 30/03/2016).

 

Elles illustreraient parfaitement la phrase du psychiatre Thomas Szasz : « Si vous parlez à Dieu, vous êtes religieux. Si Dieu vous parle, vous êtes psychotique. »

 

Ainsi d’après l’article en question Abraham incarna-t-il le premier un cas de psychose, manifestée par des hallucinations, à commencer par celle, auditive, qui lui enjoignit de sacrifier son fils à Dieu, délire mystique qui le mena à tenter un passage à l’acte.

 

Moïse souffrit lui aussi de psychose hallucinatoire chronique, manifestée par exemple dans l’épi­sode du Buisson ardent. À quoi s’est ajouté un symptôme dit de graphorrhée ou d’impulsivité irrésistible à écrire, visible dans l’épisode des Dix Commandements.

 

Jésus fut, lui, un bipolaire oscillant entre phases d’exaltation maniaque et phases dépressives, voire mélancoliques, ces dernières accompagnant son choix final d’une mort volontaire, sorte de suicide par procuration, nécessitant pour s’accomplir l’intervention miséricordieuse de Judas.

 

Paul, lui, fut un hystérique, dont le trouble de conversion ressemble fort à une crise d’épilepsie.

 

Pour Mahomet, les auteurs de l’article vont jusqu’à évoquer l’hypothèse d’une tumeur cérébrale.

 

***

 

... Que penser de tout cela ? On pourrait y voir une démystification voltairienne et ricanante de tous ces grands fondateurs, qui auraient pu être guéris par des antidépresseurs ou des électrochocs. Ces insolites comparaisons ne sont pas farfelues. On sait par exemple que l’épilepsie était déjà pour les anciens Grecs et Romains une maladie « sacrée », manifestation en l’homme de la présence divine.

 

Mais je préfère y voir un encouragement donné aux vrais malades, une réhabilitation qui leur est donnée par l’exemple de ces grandes figures, à l’image desquelles ils peuvent se considérer eux-mêmes.

 

Artistes et écrivains se reconnaîtront aussi dans le trouble bipolaire : c’est un fait bien connu que l’exaltation maniaque, si elle est ordinairement dangereuse, favorise aussi bel et bien la créativité.

 

Ainsi, sans aller jusqu’à dire, comme le Knock de Jules Romains, que tout bien portant est un malade qui s’ignore, je dirai que les linéaments de toutes ces maladies sont déjà en nous-mêmes, et qu’entre elles et nous il n’y a pas une différence de nature, mais de degré.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 14 avril 2016

 

D.R.

***

 

Cet article est extrait du livre suivant :

Petite philosophie de l'Insolite
Théron, Michel
17,00Livre papier
Lire un extrait

DESCRIPTION

Les textes composant cet ouvrage sont tous parus, sous leur forme initiale, dans un journal hebdomadaire. Ils concernent des sujets d'actualité étranges, bizarres, insolites, souvent amusants, mais se prêtant toujours à un commentaire philosophique. Ils peuvent servir de points de départ pour la réflexion individuelle du lecteur, mais aussi ils peuvent alimenter des débats thématiques collectifs (cours scolaires, cafés-philo, réunions de réflexion...).

 

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
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