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4 décembre 2021 6 04 /12 /décembre /2021 02:01

Une nouvelle traduction du missel romain est parue depuis l’entrée en Avent. Concernant le Fils de Dieu, elle remplace dans le Credo de Nicée la formule « de même nature que le Père », par : « consubstantiel au Père », calquée effectivement sur la version latine du même Credo. J’ai montré dans mon livre consacré au Credo (Les Mystères du Credo – Un christianisme pluriel, éd. BoD, 2018) qu’en effet et en toute rigueur « de même substance » ne signifie pas « de même nature ». Mon voisin par exemple est de même nature que moi, un homme, mais il n’est pas de même substance. C’est pour éviter l’accusation de pluralité séparée des personnes dans l’affirmation de la Trinité, de polythéisme finalement, qu’on a choisi la communauté de substance (consubstantialité), et non la communauté de nature (connaturalité).

 

Cependant ce dogme ne m’a intéressé d’un point de vue historique et intellectuel, et je m’étonne qu’on fasse aujourd’hui encore si grand cas de cette nouvelle traduction, au point de dire qu’elle met fin à une hérésie ou à un schisme (la traduction par « nature » serait gallicane), et qu’on se félicite d’un retour à une rigueur doctrinale depuis longtemps souhaitée (Source : france-catholique.fr, 26/11/2021).

 

Il me semble que l’Église a beaucoup d’autres choses à s’occuper, dont le scandale de la pédophilie en son sein, ou encore la compassion due aux migrants, etc., sans qu’il faille exhumer ces vieilles querelles qu’on peut voir comme purement verbales. Augustin lui-même, dans son traité sur la Trinité, a avoué à propos des trois personnes trinitaires en communauté de substance (hypostases) : « On a dit trois personnes, non pas pour dire quelque chose, mais pour ne pas demeurer muet. (Dictum est tres personæ, non ut aliquid diceretur, sed ne taceretur). »

.

À mon avis ce qu’il en fut du personnage de Jésus ou ce qu’on doit penser de son statut, comment il faut le considérer, l’appeler, etc., n’est pas ce qui compte. L’important est sa voix telle qu’elle nous est parvenue, et avec elle la conduite de vie, l’orthopraxie qu’il a prêchée : « Pourquoi dites-vous Seigneur, Seigneur, et ne faites-vous pas ce que je dis ? » (Luc 6/46)

 

La théologie même devrait distinguer les questions essentielles de celles qui sont accessoires et parfois aussi simples souffles de voix (flatus vocis), sous peine de vérifier la définition que Borges en donnait : « Une branche de la littérature fantastique. »

 

La construction trinitaire : en quoi nous concerne-t-elle vraiment ? (D.R.)

 

Voir aussi :

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2 décembre 2021 4 02 /12 /décembre /2021 02:01

L

es concours de Mini-Miss sont fréquents aux États-Unis. Chaque parent s’y projette par délégation sur sa progéniture, et c’est à qui remportera le prix qui fera la joie de toute la famille.

 

Le film de Jonathan Dayton, Little Miss Sun­shine, sorti en 2006, traite ce sujet sur un mode satirique, et montre bien qu’il est absurde pour une famille de loosers, telle celle du film, d’y espérer une quelconque revanche sociale. Cela n’empêche pas le maintien de cet usage, et par habituelle contamination, son extension aux pays de la vieille Europe, dont le nôtre. Ainsi chez nous a été créé il y a vingt-quatre ans un comité des Mini-Miss.

 

C’est pourquoi notre Sénat vient de proposer une mesure législative interdisant les concours de beauté pour les moins de 16 ans, et menaçant les organisateurs de deux ans d’emprison­nement et 30 000 euros d’amende. « Ne laissons pas nos filles croire dès leur plus jeune âge qu’elles ne valent que par leur apparence », a déclaré l’ancienne ministre Chantal Jouanno.

 

Cependant, vient de se créer un « Collectif des mamans de Mini-Miss en colère », dont la porte-parole déclare : « Les enfants voyagent, s’amu­sent, apportent du bonheur dans leurs familles avec leurs couronnes et leurs écharpes… Et puis toutes les femmes font tout pour être belles, c’est aussi ça être une femme… » (Source : Télérama, 02/10/13, p.17)

 

Autrement dit, une femme se réduit à son apparence, ce que précisément la disposition sénatoriale a voulu éviter.

 

J’ai déjà dénoncé ce diktat de l’apparence en général, qui caractérise toute la modernité. Mais s’agissant plus particulièrement d’une femme, le message lisible en filigrane est évidemment : « Sois belle et tais-toi ! »

 

Comme d’ailleurs le concours des Miss adultes en général, et même les défilés de mode, cet usage d’appréciation par pesage m’a toujours fait penser aux Comices agricoles de naguère, ou au Salon de l’Agricul­ture actuel, où l’on juge les bestiaux par leur aspect, l’état de leurs dents, etc. Et ici la chose s’aggrave encore jusqu’à l’obs­cénité par le fait qu’il s’agit d’enfants.

 

Qu’est-ce qu’une civilisation, où le seul look ainsi l’emporte sur tout le reste, c’est-à-dire sur l’essentiel ?

 

[v. Divertissement, Stupidité (II)]

 

> Article paru dans Golias Hebdo, 17 octobre 2013

 

D.R.

 

***

Cet article est extrait du livre suivant :

Petite philosophie de l'Insolite
Théron, Michel
17,00Livre papier
Lire un extrait

DESCRIPTION

Les textes composant cet ouvrage sont tous parus, sous leur forme initiale, dans un journal hebdomadaire. Ils concernent des sujets d'actualité étranges, bizarres, insolites, souvent amusants, mais se prêtant toujours à un commentaire philosophique. Ils peuvent servir de points de départ pour la réflexion individuelle du lecteur, mais aussi ils peuvent alimenter des débats thématiques collectifs (cours scolaires, cafés-philo, réunions de réflexion...).

 

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30 novembre 2021 2 30 /11 /novembre /2021 02:01

Elle fait désormais l’objet d’une taxe, depuis le 1er août, dans la ville d’Eskilstuna, dans l’ouest de la Suède. Toute personne qui mendie devra payer un permis de mendicité. Pour ce permis de trois mois, il faut débourser 250 couronnes suédoises, soit environ 23 euros. Sans lui, la mendicité est passible d’une amende de 4000 couronnes, soit environ 372 euros. En une semaine, huit permis ont été validés selon le site suédois SVT (Source : huffingtonpost.fr, 06/08/2019)

 

Évidemment cette mesure a suscité des critiques. Déjà on ne voit pas comment les mendiants, qui n’ont pas de quoi vivre, pourraient payer ce permis. Simplement on leur inflige une double peine, en ajoutant à leur misère l’obli­gation de l’acheter. Ensuite certains redoutent que des gangs criminels le paient à leur place avant de rançonner les intéressés et de leur demander des remboursements faramineux. C’est effectivement une possibilité.

 

Mais je crois que là n’est pas le principal grief qu’on peut faire à cette initiative. Son but est de normaliser la mendicité en la bureaucratisant. Et on veut la réguler de cette façon jusqu’à finalement la faire disparaître, quand les mendiants n’auront pas de quoi payer leur permis et ne pourront payer l’amende.

 

L’intention est peut-être bonne. Mais on ne voit pas comment cette mesure visant à les recenser pourrait « conduire les personnes concernées à entrer en contact avec les services sociaux et les autorités locales », comme le dit le conseiller social-démocrate de la ville.

 

Méfions-nous des projets philanthropiques. Il faut bien en voir l’hypocrisie. On connaît l’ou­vrage généreux De l’extinction du paupérisme de Louis-Napoléon Bonaparte, publié en 1844. Mais ensuite le régime du Second Empire n’a pas hésité à massacrer des pauvres à l’occasion d’émeu­tes, comme cela est dénoncé dans beaucoup de poèmes des Châtiments de Victor Hugo. Ce fut là une singulière façon d’éteindre le paupérisme !

 

Singulier de la même façon est le modèle social suédois. Au lieu de se demander d’où vient le dénuement des personnes, et comment on pourrait les aider, on prend acte de leur présence dans un corps social qui fondamentalement les rejette, et on invente un dispositif qui vise à leur disparition. Aucune pitié ou compassion ici. Simple cynisme administratif, et égoïsme foncier.

 

Mais on ne fait pas tomber la température en cassant le thermomètre.

 

> Article paru dans Golias Hebdo, 22 octobre 2020

 

 

D.R.

 

***

 

Cet article est extrait du livre suivant :

 

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
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