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2 janvier 2024 2 02 /01 /janvier /2024 02:00

O

n sait qu’il était la bête noire de Jean-Paul II, si l’on se réfère par exemple à son encyclique Veritatis Splendor de 1993.

 

Mais cette condamnation vient d’être reprise par le pape émérite Benoît XVI, qui vient de publier dans la revue chrétienne allemande Klerusblatt un texte consacré à la crise des violences sexuelles sur mineurs dans l’Église, texte qui constitue un gigantesque retour en arrière par rapport à la réflexion qui vient de s’initier sous le pape François (Source : LeMonde.fr/11/04/2019).

 

Il affirme que la raison de la pédophilie est « l’absence de Dieu ». Car « un monde sans Dieu ne peut être qu’un monde dépourvu de sens » et donc « sans notion de bien et de mal ». Autrement dit, en-dehors de la référence à Dieu, aucune morale n’est possible. Les athées apprécieront.

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Cette vision exclusiviste amène Benoît XVI à récuser toute réforme de l’Église. Cette dernière n’est pas seulement une communauté de croyants, mais a une présence transcendante : « Une Église faite par nous ne peut représenter aucune espérance... Aujourd’hui aussi, il y a l’Église sainte qui est indestructible. » Il reprend donc le dogme de l’« Église sainte », un article de foi figurant à la fin du Credo.

 

Il découle de là qu’aucune démocratie ne peut être instaurée dans Église, qui n’est pas une simple assemblée d’individus croyants, mais tient son existence d’une instance supérieure, de Dieu seul. C’est le propre de toute théocratie.

 

Or c’est sur cette affirmation, cette présomption de « sainteté » a priori de l’Église que repose tout le Pouvoir clérical. J’ai souligné que la longue impunité des prêtres pervers est venue souvent de la projection aveuglée et crédule que leurs victimes ont faite sur eux, en causant leur sidération : elles ne pensaient pas que ce qu’elles subissaient était possible de la part d’un homme de Dieu. La seule solution, à mon avis, est la désacralisation de sa personne, comme Luther l’a voulue. [v. Métacognition]

 

Peut-être faut-il espérer la venue d’une nouvelle Réforme, qui d’ailleurs ne saurait être la dernière. Comme disent les Protestants, l’Église réformée doit être toujours à réformer (Ecclesia reformata semper reformanda).

 

Le pape François a bien raison de critiquer ce que précisément son prédécesseur ici défend : le cléricalisme. Sans doute en tant que jésuite est-il habitué en morale à la casuistique, qui implique non pas bien sûr un nihilisme, mais un certain relativisme. [v. Jésuite] – Benoît XVI au contraire est psychorigide, et ce n’est pas pour rien que son dernier texte a tant d’échos dans les milieux catholiques conservateurs.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 25 avril 2019

 

D.R

 

***

 

Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

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1 janvier 2024 1 01 /01 /janvier /2024 16:50

Je vous souhaite pour la nouvelle année de connaître

le devoir d'insouciance (cliquer sur l'image) :

 

D.R.


 

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31 décembre 2023 7 31 /12 /décembre /2023 02:00

J’

ai assisté dernièrement à un concert de Noël, où l’on a chanté le fameux Minuit Chrétiens !, qui est comme on l’a dit la « Marseillaise du croyant ».

 

J’ai donc entendu l’antienne célèbre : « Noël, Noël, voici le Rédempteur ! » Mais la beauté indéniable du chant ne m’a pas empêché de réfléchir, une fois quittée l’église, sur cette idée de rédemption.

 

Elle est centrale dans la construction chrétienne. On le voit même par le refus récent du pape actuel de proclamer un cinquième dogme marial considérant Marie comme la « co-rédemptrice » du Christ (Source : lacroix.com, 13/12/2019). On peut signaler aussi l’existence en catholicisme de la congrégation des Rédemptoristes, etc.

 

L’idée de rédemption est très engageante et gratifiante pour le fidèle, qui n’en saisit pas forcément aujourd’hui l’enjeu : le rachat du péché originel.

 

Dans l’hymne Exultet, chantée le samedi saint, on apprend même que la faute du premier homme a été heureuse, puisqu’elle nous a valu un tel et si grand Rédempteur (Felix culpa, quae talem ac tantum meruit habere Redemptorem). Nous aimons toujours entendre qu’il y a dans chaque faute commise une possibilité de rachat, une occasion de résilience, en somme une « positivité de la négativité ».

 

Mais le texte néotestamentaire peut nous décevoir, car la rédemption dont on s’enchante est en fait une rançon (lutron) : « Le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup. » (Matthieu 20/28 ; Marc 10/45 ; 1 Timothée 2/6) Bien sûr, si rédemption nous fait plaisir, rançon nous choque. Et pourtant c’est le même mot en français : le premier a sa source dans le second (via un raançon médiéval). « Rédemption » a été ensuite calqué mécaniquement sur le latin redemp­tio (dont le sens est bien : rachat).

 

Cette rançon est versée à Dieu. L’idée qui s’en dégage est celle d’un créancier sévère, qui n’est satisfait que si le débiteur s’acquitte du prix de sa dette. Socin disait bien que si Dieu a été payé par le sacrifice du Fils, il n’a pas pardonné. Pardonner signifie qu’on efface la dette, et non pas qu’on la recouvre. Outre donc l’idée du péché ori­ginel, qui fait bon marché de la responsabilité individuelle, l’on peut refuser cette théologie épicière et barbare d’un Dieu inflexible, dont il faut même, comme dit le Minuit Chrétiens !« apaiser le courroux ». Elle est autorisée pourtant par les textes susdits.

 

Malgré tout nous continuerons désormais de rêver sur la Rédemption floue, en oubliant la Rançon précise dont elle provient, et le contexte qu’elle suppose. Sans doute y a-t-il des mots qui, comme le disait Valéry, ont plus de valeur que de sens.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 9 janvier 2020

 

D.R.

 

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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).

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