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16 juillet 2017 7 16 /07 /juillet /2017 01:01

Elle n’est pas réservée aux jeux des enfants. Des adultes même s’en emparent, pour peupler leur vie désertée par la passion. Ainsi a fait un Japonais de Tokyo, kinésithérapeute de 45 ans. Lorsque la flamme s’est définitivement éteinte entre lui et son épouse, après l’accouchement de celle-ci, Masayuki Ozaki a acheté, pour combler le vide, une poupée en silicone, devenue depuis l’amour de sa vie. De grandeur nature et d’un réalisme confondant, elle partage son lit dans la maison familiale, où habitent aussi sa femme et sa fille adolescente (Source : leparisien.fr, 30/06/2017).

 

L’article précise que  nombre d’hommes qui possèdent au Japon de telles poupées, appelées rabu doru (love doll), ne voient pas en elles de simples objets sexuels mais véritablement des êtres à l’image des humains, qu’ils entourent de soins quotidiens. En somme ils leur donnent vie, comme celle que Pygmalion insuffla à la statue Galatée née de ses mains. Symboliquement le sens est d’ailleurs très beau : nous pouvons donner vie à quelqu’un en le caressant, en lui manifestant notre tendresse. « Elle a la forme de mes mains », dit Éluard de L’Amoureuse. Et à l’inverse on peut tuer quelqu’un en ne s’intéressant pas à lui : de possiblement lumineux, son visage devient terne et gris. On voit bien dans la rue à voir les traits de sa figure si quelqu’un est aimé, ou pas.

 

On objectera que la poupée n’est qu’un objet. Alors il faut bien reconnaître que cette réification de son objet est tout à fait dans la logique même de la passion. Vivant, l’autre nous résiste. On ne le possède vraiment que lorsqu’il est sans vie, par exemple quand il dort, comme Proust le dit d’Albertine : ce n’est qu’ensevelie dans le sommeil qu’elle était enfin tout à fait à lui. Je pense aussi aux Belles Endormies, de Kawabata. Si l’on songe que le sommeil est l’image de la mort, il s’agit bien de nécrophilie !

 

La perplexité peut nous saisir à considérer l’ambivalence de sens que revêt la poupée. Mais nous y gagnons de percevoir notre complexité, tant le cœur humain est dédaléen et labyrinthique !

 

D.R.

D.R.

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10 juillet 2017 1 10 /07 /juillet /2017 01:01

Il semble que, comme la bêtise, elle n’ait pas de limites, et nous donne véritablement l’idée de l’infini. Ainsi à Vilnius, en Lituanie, vient de se tenir comme tous les ans une course de bébés. Les participants avaient entre 9 et 12 mois, la règle étant que « le bébé ne sache pas encore marcher ». Les « coureurs » devaient donc ramper de la ligne de départ jusqu’à la ligne d’arrivée, où les attendaient des parents et grands-parents qui les stimulaient en agitant des appâts, comme des peluches, des ballons, des pièces de lego ou même (signe des temps !) des télécommandes de télévision ou des téléphones mobiles. La course a été lancée en 1999 afin de « sensibiliser le public au droit de l’enfant » (Source : Le Parisien/AFP, 01/06/2017).

 

Certains bébés, nous dit-on, ont tout de même décidé de snober la compétition et choisi de s’asseoir sur la ligne de départ. Mais cette sagesse en puissance ne fait pas oublier la stupidité de leurs parents. Ils ont évidemment instrumentalisé leurs rejetons pour satisfaire leur vanité. Cela me fait penser aux concours des Mini-Miss, dont j’ai déjà parlé dans Golias Hebdo (n°307), et dont il est question dans le film de 2006 Little Miss Sunshine. L’enfant ainsi utilisé justifie bien la définition qu’en donne Sartre dans Les Mots : « ce monstre que les adultes fabriquent avec leurs regrets ».

 

Une des règles essentielles de la morale humaine, formulée par Kant, est qu’il faut toujours traiter autrui « non comme un moyen, mais toujours comme une fin ». Nous sommes ici exactement à l’opposé. On devrait pourtant savoir que comme disait Gibran « nos enfants ne sont pas nos enfants », c’est-à-dire que s’ils viennent bien de nous, ils ne nous appartiennent pas. Ici le ridicule le dispute à l’odieux. Les concours qui ont comme base la matière humaine ont ailleurs été prohibés, tel le lancer de nains chez nous qui faisait naguère la joie de beaucoup de discothèques. Mais le pire ici, s’agissant des enfants, c’est l’argument avancé selon lequel il s’agit de « défendre leurs droits » !

 

D.R.

D.R.

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6 juillet 2017 4 06 /07 /juillet /2017 01:01

Il semble que ce soit la moindre des choses à exiger de la part d’un intervenant dans une quelconque activité de statut social. Ainsi on attend d’un acteur que sa diction soit bien nette et compréhensible. Ou bien d’un preneur de son au cinéma qu’il fasse que les paroles soient bien audibles des spectateurs. Autrement, le cinéma n’a de « parlant » que le nom.

 

Je viens de voir le dernier film de Jacques Doillon Rodin, et je n’y ai littéralement rien compris. Vincent Lindon est encore plus inaudible que d’habitude : il ne parle pas, il grommelle, et 90% de ce qu’il « dit » est une bouillie verbale informe, au point que ce que veut signifier le film dans son ensemble nous échappe complètement. Sa façon de s’« exprimer » déteint sur sa partenaire jouant Camille Claudel, que l’on ne comprend pas davantage la plupart du temps. On a envie de sortir de la salle au bout de quelques minutes, et de demander des sous-titres !

 

Beaucoup de films modernes tombent dans le même défaut. Parfois c’est dû à la prise de son. Dans Le Mépris de Godard la musique est tellement envahissante que pratiquement rien n’est compris des paroles des acteurs. Mais souvent ce sont ces derniers qui sont responsables. Autrefois, il s’agissait aussi d’acteurs de théâtre, et au théâtre on apprenait l’art de l’élocution. Mais aujourd’hui ce n’est plus nécessairement le cas. On objectera qu’il faut être « naturel », et que dans les circonstances ordinaires de la vie on n’articule pas nettement. Mais c’est une erreur : l’œuvre n’a rien à voir avec la vie, et l’artifice y est nécessaire pour la rendre probante. Qui ne voit que dans le domaine de l’image la caricature même est plus vraie que la photographie ?

 

Au reste, le recours au « naturel », signe du fâcheux laisser-aller moderne, n’est bien souvent que l’alibi de la paresse à apprendre la diction. Il participe aussi d’une grande impolitesse. Quand on s’adresse à un public, il faut un minimum se mettre en frais pour être compris de lui. Quand cet effort n’est pas fait, on n’est pas vraiment professionnel.

 

Professionnalisme
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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).

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