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1 décembre 2014 1 01 /12 /décembre /2014 00:01

Ce blog est interdisciplinaire. Pour en explorer la grande diversité, pour faire un tri et ne voir que ce qui intéresse, pensez à cliquer sur Catégories, dans la colonne de droite


 ª(Chroniques de Golias Hebdo)

Tigre

On en a vu un il y a quelques jours se promenant en liberté dans la campagne de Seine-et-Marne. La radio a immédiatement recommandé aux enfants de ne pas sortir, et aux adultes de ne se déplacer qu’en voiture. Elle a tout de même précisé qu’on ne savait pas d’où il venait, s’il s’était échappé d’un cirque, etc. Deux cents policiers et gendarmes ont été mobilisés à cette occasion, et des spécialistes des félins appelés à la rescousse. J’imagine le frisson que toutes ces informations alarmistes ont dû produire chez les habitants de ce pays.

 

Eh bien, ce fut à tort. Car après de nouvelles analyses réalisées par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et le Parc des félins, un zoo spécialisé du département, des examens plus poussés des empreintes ont montré que l’animal, qui aux dernières nouvelles court toujours à une quarantaine de kilomètres à l’est de Paris, est un félin de petite taille, bien loin du fauve menaçant qu’on redoutait. Même la piste du lynx a été exclue. Selon l’ONCFS, le seul félin présent à l’état sauvage en Seine-et-Marne est un « chat forestier », un animal inoffensif qui ressemble à un gros matou (Source : 6Medias, 15/11/2014).

 

Ce m’est ici l’occasion de réfléchir au pouvoir amplificateur de l’imagination, que Pascal appelait une « puissance trompeuse ». Vue de loin, n’importe quelle bête, telle celle du Gévaudan, peut sembler un monstre. Les Latins le disaient bien : Major e longinquo reverentia – La considération augmente avec la distance. Puis la contagion de la peur fait le reste. Et au lieu de s’assurer de la réalité des faits, on va toujours aux supputations sur les causes, comme Fontenelle l’a montré dans son Histoire des Oracles, avec le fameux épisode de la Dent d’or.

 

Ce tigre n’était donc qu’une projection imaginaire d’individus apeurés. Il pourrait faire la matière d’une fable, qu’on pourrait aussi appliquer aux hommes, comme La Fontaine le fait dans Le Chameau et les bâtons flottants : « J’en sais beaucoup de par le monde / À qui ceci conviendrait bien : / De loin, c’est quelque chose, et de près ce n’est rien. » (Fables, IV, 10) Combien de puissants de ce monde ne sont que des « tigres de papier » ! Ils n’ont de stature que celle que nous leur donnons. Comme le dit La Boétie : « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. » Ce sont nos peurs, nos projections, qui créent notre obéissance. Merci donc à ce « tigre » inopiné, qui m’a permis une réflexion politique !

 

 

Tigre--illustration.jpg

 


 

Nota : Un recueil de toutes les chroniques précédentes, que j'ai données à Golias Hebdo de fin décembre 2008 à début mars 2014, est disponible en version enrichie, avec regroupement thématique des notions, et assorti de nombreux liens internes et externes facilitant son exploitation, sous forme de livre électronique multimédia :

   

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25 novembre 2014 2 25 /11 /novembre /2014 00:01

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 ª(Chroniques de Golias Hebdo)

Gaspillage

C’est une notion à quoi j’ai pensé à la suite de différentes informations qui nous sont parvenues. On sait par exemple que le réchauffement climatique est dû à la pollution humaine. Eh bien, comme ce réchauffement amène la prolifération des moustiques, la firme allemande Bayer va faire de l’argent en mettant au point des produits anti-moustiques. Or ce consortium chimique lui-même a contribué au réchauffement du climat par la pollution qu’il a engendrée. Le méfait profite ainsi à son auteur. On s’enrichit d’abord par la cause, et puis par l’effet.

Autre exemple : les compagnies minières, qui sont des pollueurs majeurs et quasiment des voyous de l’environnement, applaudissent au réchauffement climatique, car du fait de la fonte des glaces qu’il provoque dans l’Arctique, elles vont exploiter les richesses souterraines du Groenland : c’est pour elles une véritable aubaine. Le processus est toujours le même : d’abord on fait les dégâts, et ensuite on en tire profit, sans s’interroger en aucune façon sur la moralité du processus d’ensemble. Le seul moteur est la cupidité, et la bonne affaire passe avant tout. Comme disent les Anglais, ces pragmatistes cyniques, Business as usual  – « Les affaires comme d’habitude ».

À suivre ce raisonnement, on peut penser qu’il est bon de détruire, dans les guerres par exemple, puisqu’après il faudra reconstruire. On gagne sur les deux tableaux : d’abord on fait marcher l’industrie de l’armement, puis celle du bâtiment.

Devant tant de gaspillage, je ne peux m’empêcher de penser à ce que dit Montesquieu dans De l’esprit des lois : « Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied, et cueillent le fruit. » Il utilisait cet exemple pour caractériser le gouvernement despotique. Mais on peut l’appliquer au capitalisme effréné, à la cupidité systématique qui caractérise la situation actuelle. On n’y agit qu’à très courte vue, on pille et détruit partout sur la terre de façon irréfléchie et absurde : on est bien loin de s’occuper du « développement durable » ! En fait, on ne s’occupe que de s’emplir les poches.

→ Voir aussi : Gaz de schistes


 

Gaspillage--illustration.jpg




 

Nota : Un recueil de toutes les chroniques précédentes, que j'ai données à Golias Hebdo de fin décembre 2008 à début mars 2014, est disponible en version enrichie, avec regroupement thématique des notions, et assorti de nombreux liens internes et externes facilitant son exploitation, sous forme de livre électronique multimédia :

   

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18 novembre 2014 2 18 /11 /novembre /2014 00:01

 


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 ª(Chroniques de Golias Hebdo)

Clown

Normalement, simplement à le voir dans sa tenue excentrique, il fait rire les gens : on se moque toujours de ce qui s’écarte de la norme, et c’est bien son cas. Certes il y a des cas où un esprit plus adulte peut voir, derrière la façade joviale, la tristesse, selon ce que dit Baudelaire dans La Muse vénale : « Et ton rire trempé de pleurs qu’on ne voit pas. » On connait encore le tragique et antiphrastique « Ris donc, Paillasse ! » de l’opéra de Leoncavallo, où le héros est obligé de faire rire, au milieu d’une très grande douleur. Mais enfin ces deux faces restent dans le cadre de l’humain, dont la condition, même fort complexe, voire contradictoire, reste compréhensible.

Mais le clown aujourd’hui sort de ce cadre, pour entrer dans celui de l’incompréhensible à tout esprit normal. Je veux parler de ces clowns effrayeurs et méchants, dont la mode sévit actuellement. Ainsi simplement dans mon département de l’Hérault on a noté plusieurs agressions dont ils ont été les auteurs. À Montpellier, un piéton de 35 ans a reçu 30 coups de barres de fer par un homme grimé en clown qui voulait le dépouiller. Plusieurs autres cas se sont produits dans d’autres localités proches de chez moi (Source : Le Parisien, 26/10/2014).

Cette mode des « clowns qui attaquent » a été lancée sur les réseaux sociaux depuis des États-Unis. On a beaucoup craint qu’elle s’amplifie et se déchaîne à l’occasion de la fête d’Halloween, au point que beaucoup de municipalités ont pris des mesures pour la prévenir à cette occasion. Ce qui me semble le plus préoccupant est le mélange et le brouillage qu’elle peut provoquer dans l’esprit. Normalement ce dernier, sans être manichéen, aime bien catégoriser, mettre de l’ordre dans ses valorisations et ses refus. Or faire d’un personnage normalement comique un personnage inquiétant confond tous les repères structurants. Déjà Orange mécanique, le film de Kubrick inspiré du roman de Burgess, montrait son « héros », Alex, commettant toutes ses atrocités déguisé en clown. Je vois là un signe prémonitoire de la fin d’une société taraudée par le nihilisme, perdant tous ses repères, et à l’image de ce que disent les sorcières de Macbeth (« Le beau est affreux, et l’affreux est beau »), plongeant dans le chaos d’une ambiguïté totalement déstabilisante.


Clown--Illustration-.jpg

 


 

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).

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