Un récent sondage montre une très grande diminution de la confiance des Français vis-à-vis du personnel politique, ainsi que la présence en eux d’un désir d’autorité, corrélé à l’existence d’un pouvoir exécutif fort : 73% d’ente eux réclament « un vrai chef en France pour remettre de l’ordre ». (Source : publicsenat.fr, 11/02/2025)
La cause de cette désaffection caractérise ce qu’on appelle la « fatigue démocratique ». Trop de contact avec les représentants du système démocratique, omniprésents chaque jour dans les medias, fait apparaître leurs imperfections, leurs ambitions secrètes, quand ce n’est pas leur corruption. Si le respect augmente avec la distance (major e longinquo reverentia), il se perd avec la proximité, que recherchent pourtant les intéressés eux-mêmes en se prodiguant çà et là autant qu’ils le peuvent. Or on sait assez que la familiarité engendre la haine (familiaritas odium parit). La suite de cette situation est parfaitement incarnée par la fable de La Fontaine Les Grenouilles qui demandent un Roi, modèle parfait, et intemporel, d’analyse politique.
Fatiguées de l’« état démocratique » les Grenouilles demandent un souverain à Jupiter. Ce dernier leur envoie d’abord un soliveau, qu’elles refusent parce qu’elles le trouvent trop proches d’elles, et trop passif. Sur leur nouvelle demande, c’est une grue qui leur est envoyée, et qui les dévore. La leçon est tirée par Jupiter : elles n’auraient pas dû changer leur premier état (démocratique), pas plus que refuser le suivant (le Roi « débonnaire et doux »). Désormais, elles doivent se contenter de celui qu’elles ont, « de peur d’en rencontrer un pire ».
C’est naturellement que la démocratie se corrompt par trop de ressemblance de ses acteurs avec les mœurs du temps, et leur abandon de l’exemplarité, la fin de la « vertu » (du civisme) selon Montesquieu. On ne respecte plus celui qu’on ne sent plus respectable. Mais il faut bien réfléchir avant de souhaiter un homme fort, le « vrai chef qui mettra de l’ordre » de notre sondage. C’est la porte ouverte à toute tyrannie autocratique et fascisante, dont l’Histoire passée et toute l’Actualité de par le monde nous donnent des exemples. Ne soyons donc pas comme les Grenouilles écervelées. Si imparfait que soit le régime démocratique (et il l’est évidemment), gardons-nous d’être dévorés par celui que nous pourrions appeler de nos vœux pour le remplacer.
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