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27 novembre 2023 1 27 /11 /novembre /2023 02:00

O

n le voit renaître chez certaines instances religieuses du fait de la pandémie du coronavirus.

 

Ainsi l’Église orthodoxe grecque a refusé de s’abstenir de donner la communion à ses fidèles malgré les mesures sanitaires prises par les autorités (Source : la-croix.com, 11/03/2020).

 

L’Église catholique romaine a décidé d’accor­der « l’indulgence plénière » ou pardon des péchés, aux croyants frappés par la pandémie, à condition qu’ils aient participé à des célébrations retransmises à distance dans un esprit de dévotion, et pour les mourants, qu’ils aient récité « régulièrement quelques prières durant leur vie » (ladepeche.fr, 22/03/2020).

 

Ces réactions procèdent d’un esprit infantile dans le premier cas, pour ce qui est de l’attache­ment au processus magique de l’eucha­ristie, et infantilisant dans le second, dévoilant une pastorale qui fait marcher les fidèles par la carotte et le bâton : aux bons croyants on vient en aide, mais aux mauvais on ne pardonne pas. On pensait que ces « indulgences » étaient reléguées aux vieilles lunes, depuis que Luther les a dénoncées. Mais non, elles perdurent, et ne font pas grandir le fidèle, qu’elles maintiennent démuni, oscillant perpétuellement entre l’espoir d’un secours et la menace d’un châtiment.

 

Mais le comble a été la déclaration en ligne du cardinal américain Raymond Burke, selon lequel les fidèles devraient assister à la messe malgré le coronavirus. Résidant en Italie, pays qui à ce jour a connu le plus de morts du fait de l’épidémie, sa déclaration est d’autant plus inadmissible (Source : ncronline.org, 24/03/2020).

 

Comme je l’ai prévu dans mon article Peur (Golias Hebdo, n°616), réapparaît la barbare théologie de la rétribution, selon laquelle l’épreuve est méritée parce qu’étant un châtiment de la justice de Dieu (théodicée).

 

Ainsi Burke écrit : « Il ne fait aucun doute que de grands maux comme la peste sont un effet du péché originel et de nos péchés réels. Dieu, dans sa justice, doit réparer le désordre que le péché introduit dans nos vies et dans notre monde. »

 

Là encore on pensait que cette idée était caduque : c’est bien assez que nous soyons dans le monde punis par nos péchés (ou nos erreurs, nos faux-pas), sans que nous le soyons encore pour nos péchés. Mais non, tous les vieux réflexes dogmatiques et cléricaux refont surface. Nous sommes loin des lumières. L’obscurité de la barbarie est insondable, et son irresponsabilité, totale.

 

[v. Infantilisme I et II]

Article paru dans Golias Hebdo, 9 avril 2020

 

#Religion. #Covid. #Rétribution.

 

 

***

 

Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

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25 novembre 2023 6 25 /11 /novembre /2023 02:00

Elle est source souvent de découragement dans l’Histoire, dont on dit alors qu’elle bégaie, alors qu’on attendrait qu’elle progresse par une amélioration des choses, en tenant compte des erreurs passées. On en a un exemple navrant aujourd’hui.

 

Ce que connait Israël est la stricte répétition de ce qui s’est produit il y a plus de vingt ans aux États-Unis, avec le bombardement des tours jumelles de New-York. D’abord la sidération devant l’incompréhensible, puis la colère irrépressible vouant aux gémonies un « Axe du Mal », avec le désir de s’en venger définitivement. Et aussi par tous moyens : on n’a pas hésité à recourir pour ce faire à de fausses preuves sur de soi-disant armes de destruction massives de l’ennemi. La riposte aveugle s’est produite, sans aucun égard à ce qu’elle pouvait engendrer. On n’a pas consulté les spécialistes du terrain, qui auraient pu donner de prudents avis, par exemple sur la naïveté qu’il y a à vouloir imposer la démocratie dans un pays qui n’y est pas préparé. Et ainsi, comme la suite l’a montré, le Proche-Orient a sombré pour longtemps dans le chaos.

 

La situation y semble la même aujourd’hui. Malgré l’avis du président états-unien qui lui a rappelé l’erreur passée de son pays (ce qui est fort rare et l’honore), le premier ministre israélien ne fait que céder à un désir effréné de vengeance, une volonté d’extermination de l’adversaire, sans se demander à quoi cette fuite en avant peut aboutir. On ne sait certes pas encore exactement ce qui en résultera, mais on conviendra que l’exemple états-unien passé n’est pas de bon augure.

 

Il semble que toujours dans l’Histoire les mêmes causes produisent les mêmes effets. Le résultat est une morne et tragique répétition. L’Ecclésiaste l’avait déjà dit : « Rien n’est nouveau sous le soleil ». Et aussi Lucrèce : « Toutes choses sont toujours pareilles – Eadem sunt omnia semper ». Face à cette pessimiste constatation, pouvons-nous formuler l’espérance qu’elle soit démentie un jour ? Qu'il y ait par exemple une solution politique à cette question ? L'Espérance humaine est en tout cas si folle et illogique que, selon Péguy, elle surprend Dieu lui-même. Mais n’est-ce pas la seule possibilité qui reste, au moins à certains, face à l’absurdité de l’universel recommencement ? Le contraire d’une certitude, simplement un vœu, encore inséparable d’un fond de lucidité. Qu’un jour vienne enfin où comme dit l’Apocalypse : « Voici, je fais toutes choses nouvelles. » (21/5)

 

 

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23 novembre 2023 4 23 /11 /novembre /2023 02:00

C

elle de l’État en matière de religions est chez nous un principe essentiel depuis la séparation de 1905. Autrement dit, son rôle n’est pas d’organiser et d’institutionnaliser leur expression publique, mais simplement de la garantir, sans aucune préférence pour l’une ou l’autre d’entre elles, en respectant de la même façon ceux qui ne se réclament d’aucune d’elles, et aussi de permettre de s’exprimer à ceux qui manifestent leur désaccord avec elles toutes.

 

C’est à quoi j’ai pensé en voyant les politiques s’agiter autour de la question d’un éventuel nouveau « Concordat » spécifique que l’État pourrait passer avec telle religion particulière, dont on pense qu’elle pourrait favoriser le terrorisme.

 

Bien sûr, c’est l’émotion, tout à fait légitime au demeurant, causée par les derniers attentats et actes de violence auxquels nous venons d’assis­ter, qui est à la base de cette idée. Il reste qu’elle est tout à fait contraire à notre tradition actuelle de laïcité, qu’il serait à mon avis extrêmement dangereux d’abandonner.

 

Qui ne voit que dans cette brèche pourraient s’engouffrer les différents courants religieux traditionnels pour réclamer le rétablissement d’un « Concordat », c’est-à-dire un statut privilégié abandonné depuis plus d’un siècle ? La porte serait ouverte à un nouveau communautarisme, et ferait éclater la cohésion nationale basée sur la neutralité de la Puissance publique, garantissant l’égalité absolue entre les citoyens, athées compris, et la liberté de conscience de chacun. Que l’État se contente donc d’assurer leur sécurité in­conditionnelle, et n’intervienne pas plus avant !

 

On n’a pas besoin de religions officiellement reconnues et légitimées. À cet égard, je trouve choquant que l’État ne veuille dialoguer qu’avec leurs représentants traditionnels, comme s’ils étaient seuls représentants de ce que pensent nos concitoyens. Où est le dialogue avec les agnostiques, et les athées déclarés, qui sont dans notre pays majoritaires en nombre ? Pourquoi telle instance religieuse serait-elle privilégiée ?

 

Le malheureux prêtre récemment égorgé n’a pas à bénéficier d’un statut particulier, sous prétexte qu’il relève d’une certaine sacralité : il n’a pas plus d’importance que tel ou tel malheureux passant victime de l’attentat niçois. Ils sont tous deux victimes d’une même barbarie, à laquelle seule l’État doit livrer son combat.

 

Je ne suis pas contre le dialogue, mais s’il y en a un, il doit se faire avec tous. Je sais bien aussi faire la différence entre laïcité et laïcisme, je sais tout l’héritage culturel et artistique que nous devons aux religions. Mais je sais aussi leurs méfaits passés. Quand se résoudra-t-on à y voir simplement le patrimoine intérieur, spirituel de chacun, le respecter en tant que tel, une fois décanté et approprié, mais se consacrer dans l’espace public à la seule tâche qui convienne : la protection de tous les citoyens, sans exception ?

 

Article paru dans Golias Hebdo, 1e septembre 2016

 

#Religion. #Concordat. #Laïcité.

 

***

 

Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
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